Le Comité

1. Prend note que la Roumanie et la République de Moldova ont proposé la candidature de l’art de la blouse traditionnelle avec broderie sur l’épaule (altiță), élément de l’identité culturelle en Roumanie et en République de Moldova (n  01861) pour inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

L’art de la blouse traditionnelle avec broderie sur les épaules (altiță) est un élément essentiel des costumes populaires portés par les hommes et les femmes en Roumanie et en République de Moldova. Il allie une coupe extrêmement simple et de riches ornements colorés qui sont brodés selon des techniques complexes. Les blouses sont blanches, en fibres naturelles (lin, coton, chanvre ou bourre de soie), et les broderies complexes associent des lignes horizontales, verticales et diagonales pour former un motif et une texture spécifiques. Les styles et techniques diffèrent selon les régions et l’âge des personnes qui portent les blouses, mais aussi en fonction des compétences des brodeuses. Les motifs et les ornements sont également variés : des formes géométriques et stylisées aux formes organiques, des couleurs sombres aux couleurs vives. Les blouses brodées sont entièrement fabriquées à la main et les tentatives récentes visant à mécaniser certaines opérations et à simplifier les ornements et les techniques s’écartent de la tradition. Exclusivement féminine, cette pratique artisanale se transmet habituellement au sein des familles, même si quelques organisations, musées et écoles proposent des cours et des programmes de formation. De nos jours, l’intérêt pour la fabrication de ces blouses ne cesse de croître, la pratique étant vue à la fois comme un loisir et un moyen d’affirmer son identité nationale et d’entretenir des liens visibles avec le passé.

2. Considère que, d’après les informations contenues dans le dossier, la candidature satisfait aux critères suivants pour une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

R.1 : La blouse traditionnelle avec altiță est faite de riches ornements qui sont brodés dans une palette de couleurs variées et harmonieuses. Les détentrices et praticiennes sont, entre autres, les femmes qui cousent au sein de leur foyer, les artisanes, les membres d’organisations à but lucratif ainsi que les membres de clubs et de groupes traditionnels. Les connaissances associées à l’élément se transmettent dans les familles mais aussi via l’éducation formelle (dans des écoles d’arts et métiers ou dans des organisations à but lucratif, par exemple). Des camps créatifs, des cours d’été et des concours sont organisés afin de favoriser la transmission des connaissances et compétences associées à l’élément. La blouse traditionnelle avec altiță est une marque forte de l’identité. Elle est un vêtement de cérémonie et de fête courant, porté, entre autres, lors d’événements au sein des communautés, de rituels et de représentations scéniques. Elle est portée par des femmes de tout âge, de différents milieux sociaux et professionnels. Le dossier explique que le savoir-faire relatif à la fabrication des blouses est exclusivement féminin. Bien que le dossier n’explique pas le rôle joué par les hommes lors de la pratique et la transmission de l’élément, les photos qui accompagnent le dossier montrent des hommes portant des chemises traditionnelles.

R.4 :  Le dossier de candidature explique que les praticiennes en Roumaine, membres d’associations et d’ateliers d’artisanat, ont participé à l’élaboration du dossier et du plan de sauvegarde. En effet, elles ont pris part aux efforts de documentation et de recherche sur le terrain ainsi qu’à des entretiens. En République de Moldova, les communautés concernées ont participé à des séminaires, des formations et des conférences scientifiques et ont aidé à élaborer le dossier de candidature. Le dossier contient une série de lettres de consentement libre, informé et préalable, signées par des individus, des associations et des ateliers d’artisanat des deux États soumissionnaires. L’accès à l’élément n’est entravé par aucune pratique coutumière. Il y a certains secrets associés à ce savoir-faire, qui relèvent des particularités locales et régionales Même si le Comité estime que les informations contenues dans le dossier et relatives à la participation des communautés sont déséquilibrées entre les deux pays, les informations générales fournies satisfont au critère R.4.

R.5 :  L’élément est inscrit à l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel de Roumanie et à l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel de la République de Moldova. Les Inventaires sont tenus, respectivement, par le Ministère de la culture de Roumanie et le Ministère de l’éducation, de la culture et de la recherche de la République de Moldova. En Roumanie, l’élément a été identifié et inventorié par un réseau d’ethnographes, d’artisanes, de couturières dans les zones rurales, d’autres personnes travaillant dans ce domaine et de passionnés de cet artisanat. En République de Moldova, les communautés, groupes, ONG et instituts culturels et de recherche ont pris part à l’inventaire de l’élément en répondant à des questions et en menant des recherches sur le terrain.

3. Considère en outre que, sur la base des informations fournies par les États parties au Comité à sa présente session, les critères suivants d'inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité sont satisfaits :

R.2 :  Aux niveaux local, national et international, l’inscription de l’élément encouragera, selon le dossier, les communautés à sauvegarder l’élément et à plus apprécier l’artisanat associé à l’élément. Il sensibilisera à d’autres éléments du patrimoine culturel immatériel qui se pratiquent en lien étroit avec les significations culturelles et le contexte social qu’implique cet artisanat (artisanat textile divers, événements familiaux et communautaires, rituels et fêtes, etc.), notamment en valorisant le concept de patrimoine culturel immatériel en tant que source importante d'identité pour ses détenteurs. Au niveau international, l'inscription inspirera d'autres parties prenantes à documenter et à sauvegarder les pratiques de fabrication de vêtements traditionnels. L’élément fusionne une tradition profondément enracinée et appréciée avec une innovation et une recréation constante, ce qui peut stimuler un dialogue riche et de nouvelles collaborations entre individus, groupes, communautés, chercheurs, promoteurs culturels, entrepreneurs et autres.

R.3 : Le dossier explique que les communautés se sont impliquées dans les efforts de sauvegarde passés et le sont toujours dans ceux en cours. Elles participent par exemple à des expositions, foires, événements culturels et ateliers. Le dossier fournit des informations sur les mesures de sauvegarde proposées, qui ont été suggérées au cours du processus de candidature par les détenteurs et les praticiens de l'élément - communautés, groupes et individus de tous âges et genres dans les deux pays. Afin de soutenir de manière appropriée les efforts de sauvegarde qui seront entrepris par les communautés locales, les associations d’artisans, les ONG, les établissements d’enseignement et de recherche, les États parties ont lancé un plan national de sauvegarde pour suivre de près et mettre à jour les informations sur l’élément, pour apporter un soutien aux détenteurs à organiser des ateliers interactifs, pour sensibiliser et transmettre leurs connaissances et compétences aux nouveaux apprentis, à héberger une plateforme en ligne de reconnaissance des activités des praticiens, des événements locaux et des projets promouvant l’élément tant dans les écoles qu’auprès de la société civile. Les communautés continueront à être impliquées dans la conception et la planification de toutes les mesures de sauvegarde, et leurs commentaires et contributions seront renforcés dans les deux pays.

4. Décide d’inscrire l’art de la blouse traditionnelle avec broderie sur l’épaule (altiță), élément de l’identité culturelle en Roumanie et en République de Moldova sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité ;
5. Encourage les États parties, lors des futures soumissions de dossiers de candidatures, à fournir des explications plus détaillées concernant les rôles spécifiques de chaque genre concernant l’élément proposé ;
6. Encourage en outre les États parties à garantir la plus large participation possible des communautés concernées dans la planification et la mise en œuvre des mesures de sauvegarde ;
7. Encourage également les États parties à fournir des explications plus détaillées, lorsqu’ils soumettront des dossiers de candidatures à l’avenir, sur les fonctions sociales et significations culturelles de l’élément, au lieu de se concentrer sur les descriptions des produits associés à l’élément.