Le Comité
- Prend note que la République islamique d’Iran et la République arabe syrienne ont proposé la candidature de la fabrication et la pratique de l’oud (n 01867) pour inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :
L’oud est un instrument traditionnel voisin du luth, joué en Iran et en Syrie. Cet instrument à manche court se place sur la jambe du musicien, qui bloque les frettes avec les doigts d’une main et pince les cordes avec l’autre. Dans les deux pays, l’oud comprend une caisse de résonance piriforme en bois de noyer, de rose, de peuplier, d’ébène ou d’abricotier. La fabrication d’un oud peut prendre jusqu’à 25 jours : le bois doit d’abord sécher et durcir, il est ensuite traité à l’eau et la vapeur pendant 15 jours pour renforcer sa résistance. Les ouds sont proposés dans différentes tailles en fonction de la taille des musiciens, et décorés de sculptures en bois et de motifs en mosaïque. Ils comportent généralement cinq paires de cordes, et une sixième peut être ajoutée. Avec ses registres basse et baryton, l’instrument peut produire des notes mélodiques et harmoniques. Le oud est pratiqué, en solo ou dans des ensembles, à de très nombreuses occasions. Il accompagne des danses et des chants traditionnels. La pratique est transmise dans le cadre d’une relation entre maîtres et apprentis et dans des centres musicaux, écoles et universités des zones urbaines. Les artisans sont principalement des hommes, même si depuis quelques années des jeunes femmes s’intéressent à cet art.
- Considère que, d’après les informations contenues dans le dossier, la candidature satisfait aux critères suivants pour une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :
R.1 : L’oud est un instrument de musique dont les racines sont profondément ancrées dans la région, et qui est pratiqué à de très nombreuses occasions, comme des mariages, des événements culturels, des festivals, des rassemblements familiaux et des funérailles, accompagné de chants et de danses traditionnels. Il sert ainsi de marqueur identitaire en Iran et en Syrie. En Iran, les détenteurs sont, entre autres, les interprètes, les luthiers, et les instructeurs. Les connaissances se transmettent par le biais de programmes d’apprentissage et de manuels d’instruction ainsi que dans le cadre de studios de fabrication. En Syrie, les détenteurs sont, entre autres, les musiciens, les compositeurs, les artisans, les maîtres artisans et leurs jeunes apprentis. Les connaissances se transmettent dans le cadre d’une formation informelle, par les maîtres artisans, et dans le cadre de programmes d’enseignement formel. En Iran, l’oud est joué lors de cérémonies rituelles et favorise l’empathie entre les tribus. De même, en Syrie, l’oud permet d’unir les familles et les communautés issues de différents milieux et classes sociales, renforçant ainsi la cohésion et l’inclusion.
R.2 : Au niveau local, l’inscription établirait un lien entre les communautés locales et la Convention de 2003. Au niveau national, elle prouverait que le patrimoine culturel immatériel peut contribuer à une identité culturelle partagée et encouragerait les praticiens d’autres éléments du patrimoine culturel immatériel, tels que des artisans et des musiciens, à collaborer pour sauvegarder le patrimoine culturel immatériel. Au niveau international, l’inscription confèrerait une plus grande visibilité aux éléments diversifiés du patrimoine culturel immatériel musical dans le monde et véhiculerait un message fort quant au rôle du patrimoine culturel immatériel comme outil de coopération internationale et créateur de liens entre les communautés au-delà des frontières des États. Concernant la créativité humaine, l’élément est associé à une grande précision et à la créativité des artisans.
R.5 : L’élément est inscrit à l’Inventaire national iranien du patrimoine culturel immatériel depuis février 2019. L’Inventaire est mis à jour tous les trois ans. En Syrie, l’élément est inscrit à l’Inventaire national des éléments du patrimoine culturel immatériel syrien, qui est mis à jour tous les deux ans, depuis mars 2017. Les inventaires sont tenus par les ministères respectifs des États soumissionnaires. Les musiciens, experts culturels, chercheurs et autres représentants associés à l’élément ont pris part à cet inventaire.
- Considère en outre que, sur la base des informations contenues dans le dossier et fournies par les États parties soumissionnaires dans le cadre du processus de dialogue, le dossier de candidature satisfait au critère suivant pour une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :
R.3 : Le dossier fournit des informations sur les efforts de sauvegarde passés et actuels de chaque État soumissionnaire, y compris les cours de formation, les concerts et les efforts de documentation. Les mesures de sauvegarde conjointes passées comprennent des concerts conjoints Iran-Syrie, la publication conjointe de CD de musique et des efforts de recherche. Les mesures de sauvegarde conjointes proposées comprennent l’organisation de festivals de musique entre les deux pays, l’échange de connaissances traditionnelles sur la fabrication et la pratique du oud entre les maîtres praticiens, des projets de recherche conjoints et la diffusion des programmes d’oud des deux pays. En outre, chaque État partie soumissionnaire a proposé des mesures de sauvegarde pour son propre État. En Syrie, les communautés et les porteurs concernés ont mené le processus de candidature, y compris la suggestion, la modification et l’approbation des mesures de sauvegarde. L’Iran a précisé, dans le cadre du processus de dialogue, que les artisans et les joueurs d’oud ont participé à des ateliers qui comprenaient des discussions sur la situation actuelle de l’élément du point de vue du praticien, et la proposition de futures mesures de sauvegarde pour assurer la présence forte et continue de l’oud.
R.4 : En Iran, l’ONG Iranian House of Music a organisé un groupe d’interprètes/artisans d’oud, géographiquement répartis dans tout le pays, pour participer au processus de candidature. L’ONG a participé à la préparation de la partie iranienne du dossier de candidature et a également travaillé avec ses partenaires syriens sur ce dossier de candidature. En Syrie, le ministère de la culture a mis en place un groupe de travail pour assurer le suivi du processus de candidature. Sur une période de 11 mois, le groupe de travail a organisé des réunions, des visites sur le terrain et des entretiens en face à face avec des porteurs, des universitaires, des chercheurs et des représentants du gouvernement, ainsi que des ONG qui ont apporté des points de vue variés. Un groupe de travail distinct a été créé par le ministère syrien de la culture et l’IMCHTH en Iran, représentant les États respectifs, pour préparer conjointement la candidature multinationale. Chaque État a recueilli des informations pertinentes auprès de ses communautés pour préparer le dossier de candidature. Du matériel audio-visuel a été collecté afin de représenter les communautés des deux pays. Les étapes finales du processus de candidature ont été suivies de près par les experts des ONG : le Syria Trust for Development et l’Iran House of Music, et l’Iran Museum of Music. Les deux États soumissionnaires ont fourni des lettres de consentement de la part d’ONG, d’artisans, d’interprètes de l’oud, d’associations et d’institutions.
- Décide d’inscrire la fabrication et la pratique de l’oud sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité ;
- Félicite l’État partie pour la soumission d’un dossier amélioré suite à la décision du Comité de renvoyer le dossier en 2020 ;
- Encourage les États parties, lorsqu’ils soumettront des dossiers de candidature à l’avenir, à inclure des explications plus détaillées sur les fonctions sociales et les significations culturelles de l’élément aux dossiers de candidature.