Le Comité
- Prend note que les Seychelles ont proposé la candidature du moutya (n 01690) pour inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :
Le moutya a été introduit aux Seychelles par les esclaves africains qui sont arrivés avec les colons français au début du XVIIIe siècle. À l’époque, cette danse était traditionnellement pratiquée de nuit dans la forêt, à distance de la plantation où vivaient leurs maîtres. Le moutya servait à l’origine de réconfort psychologique contre les privations et la pauvreté et représentait un moyen de résister à la servitude et à l’injustice sociale. Sensuelle, cette danse à la chorégraphie simple est traditionnellement exécutée autour d’un feu de joie. L’instrument de musique utilisé est un grand tambour en peau de chèvre à cadre étroit, joué principalement par les hommes. La danse commence par le chauffage des tambours au-dessus du feu. Une fois les tambours chauds, les musiciens donnent le rythme tandis que les hommes dans la foule lancent divers thèmes, habituellement des commentaires d’ordre social, auxquels les danseuses répondent d’une voix aiguë. Les hommes et les femmes entament alors une danse sur un tempo modéré, en roulant des hanches et en frappant du pied. Les danseurs s’approchent, mais ne se touchent pas. Aujourd’hui encore, le moutya est une forme d’expression de l’identité culturelle qui a conservé sa forme d’origine. Elle est généralement pratiquée spontanément au sein de la communauté, mais aussi à l’occasion de rassemblements sociaux et d’événements culturels. Le moutya se transmet de manière informelle par la pratique, l’observation et l’imitation, ainsi que de manière formelle par la recherche, la documentation et la diffusion.
- Considère que, d’après les informations contenues dans le dossier, ainsi que les informations fournies par l’État soumissionnaire dans le cadre du processus de dialogue, la candidature satisfait aux critères suivants pour une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité comme suit :
R.1 : L’élément est une danse nocturne exécutée spontanément dans des espaces ouverts, en plein air, autour d’un feu de camp. Elle peut être pratiquée après le jour de paie ainsi qu’à l’occasion de rassemblements sociaux ou d’événements nationaux et culturels. Il existe dix groupes de moutya actifs et quatre-vingt-quatre praticiens répartis sur les trois îles principales. L’élément est transmis de manière formelle par la recherche, la documentation et la diffusion des archives nationales, les musées nationaux, l’institut créole, la Seychelles Heritage Foundation et le musée national d’histoire. Il est transmis de manière informelle par la pratique, l’observation et l’imitation. Certaines écoles enseignent le moutya en tant qu’activité extra-scolaire. Il s’agit d’une forme de divertissement et d’un vecteur d’expression sociale qui renforce l’identité culturelle et constitue une importante référence historique.
R.2 : Le processus de candidature permettrait d’accroître la prise de conscience de la communauté et de créer un sentiment de fierté vis-à-vis de l’élément, mais aussi du patrimoine culturel immatériel de manière plus générale. Il contribuerait également à renforcer la cohésion sociale et encouragerait la reconnaissance et la valorisation des praticiens et des détenteurs. Au niveau national, la candidature mettrait l’accent sur la Convention de 2003 et les mécanismes d’inscription. Au niveau international, elle améliorerait la représentation du patrimoine culturel immatériel d’origine africaine et des éléments liés à l’histoire de l’esclavage. L’inscription servirait d’exemple de revitalisation d’un patrimoine autrefois opprimé. Le dialogue entre les communautés, les groupes et les individus sera encouragé par des échanges culturels entre les chercheurs, les artistes et tout autre acteur pertinent au sein des communautés créoles des Seychelles et d’autres pays de la région. La créativité humaine et le respect de la diversité culturelle seront encouragés par les performances spontanées et la fabrication artisanale des tambours moutya.
R.3 : Les mesures de sauvegarde passées et actuelles comprennent : des cours de tambour pour les enfants et les jeunes adultes ; la recherche, la documentation, la publication, les ateliers et les inventaires liés à l’élément ; l’abrogation du règlement sur les tambours de 1935, qui interdisait de jouer du tambour après 21 heures ; et la révision de la politique culturelle nationale pour aborder les questions de commercialisation et de décontextualisation. Diverses mesures de sauvegarde sont proposées, comme l’élaboration de lignes directrices pour la fabrication de tambours, le jeu de tambour et le chant. Une mesure notable consiste à faciliter les échanges culturels entre les praticiens et les détenteurs de connaissance seychellois et les praticiens d’éléments similaires dans d’autres pays. Un comité national comprenant des représentants de la communauté, des praticiens et des détenteurs de connaissances a élaboré un plan d’action de trois ans pour mettre en œuvre les mesures de sauvegarde proposées.
R.4 : La communauté a participé au processus de candidature par le biais de diverses réunions, d’ateliers, de groupes de discussion, de spectacles saisonniers et d’entretiens menés par l’équipe de rédaction, composée de professionnels du patrimoine et de la culture. Des lettres de consentement ont été signées par différents membres de la communauté d’âges et de milieux variés. Une attention particulière a été accordée afin que tous les genres soient représentés. Il n’existe actuellement aucune restriction coutumière limitant l’accès à l’élément.
R.5 : L’élément figure dans l’inventaire national du patrimoine culturel immatériel des Seychelles : la communauté créole seychelloise, qui relève de la responsabilité de la section de recherche et de protection du patrimoine national (NHRPS), qui fait partie du département de la culture. L’élément est inclus dans l’inventaire national depuis novembre 2010. Les inventaires sont régulièrement mis à jour lorsque des informations complémentaires sont recueillies auprès de la communauté, lorsque les informations sur les éléments existants sont révisées pour tenir compte de leur évolution et lorsque de nouveaux éléments sont ajoutés. L’élément a été mis à jour pour la dernière fois en décembre 2019.
- Décide d’inscrire le moutya sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité;
- Félicite l’État partie pour sa première inscription et pour l’amélioration de son dossier suite à la décision du Comité de renvoyer la candidature en 2019.