Décision du Comité intergouvernemental : 16.COM 8.B.27

Le Comité

  1. Prend note que le Myanmar a proposé la candidature de la pratique de la culture du thanakha au Myanmar (n  01720) pour inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

Le thanakha est une pâte utilisée par les hommes, les femmes et les enfants au Myanmar pour des raisons esthétiques, pour les soins de la peau et dans le cadre de la médecine traditionnelle. Confectionnée à partir de l’écorce des arbres thanakha, qui sont des arbres pérennes cultivés dans les régions arides du centre du Myanmar, la pâte est obtenue en broyant l’écorce de thanakha avec de l’eau sur une pierre circulaire. La pâte crémeuse qui en résulte est appliquée sur le visage et les mains, et parfois sur tout le corps. Elle peut être appliquée sur le visage en traçant une forme circulaire ou parfois la forme d’une feuille ou d’une fleur. En été, en particulier, paysans et ouvriers du bâtiment se badigeonnent généreusement de la tête aux pieds pour bénéficier de son effet rafraîchissant et apaisant et de son parfum agréable. La pratique de l’application du thanakha est transmise dans le cercle familial où elle joue un rôle important. Lorsqu’ils appliquent la pâte sur les jeunes enfants, les anciens leurs parlent en même temps des bonnes manières, de l’éthique et des valeurs morales. Dans les festivals et les rituels, on allume des feux dans lesquels on brûle l’écorce parfumée du thanakha, et la pâte parfumée est utilisée pour nettoyer la statue du Bouddha. Certaines régions célèbrent aussi Thanakha Par Toe Pwe, un festival culturel dédié au thanakha. Il existe des preuves archéologiques de la préparation et de l’utilisation du thanakha remontant au 12ème siècle.

  1. Considère que, d’après les informations contenues dans le dossier, la candidature satisfait au critère suivant pour une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

R.1 : L’élément est lié aux pratiques en rapport avec la nature et l’univers, dans le cadre de divers festivals religieux et culturels. Les détenteurs et les praticiens sont des hommes, des femmes et des enfants de tous les âges et issus de différentes ethnicités et communautés. L’élément est transmis de génération en génération au sein des familles ainsi que lors d’événements et d’enseignements formels. Le thanakha joue un rôle crucial dans la vie quotidienne des habitants du Myanmar et a un lien profond avec l’histoire du Myanmar et les pratiques religieuses et familiales. Son utilisation contribue au bien-être général et est associé à la prière et à l’enseignement des bonnes manières, de l’éthique et des valeurs.

  1. Considère en outre que les informations contenues dans le dossier ne sont pas suffisantes pour permettre au Comité de déterminer si les critères suivants pour une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité sont satisfaits :

R.2 : La candidature ne fournit pas d’informations suffisantes sur la façon dont l’inscription contribuera à garantir la visibilité du patrimoine culturel immatériel en général et la sensibilisation à ce dernier au niveau international. Au lieu de cela, la candidature privilégie uniquement la promotion du thanakha et du patrimoine culturel immatériel du Myanmar. Le dossier n’explique pas non plus suffisamment comment l’inscription va promouvoir le respect de la diversité culturelle. Le dossier souligne de façon importante la relation avec l’environnement naturel et les ressources naturelles, ainsi que les connaissances médicales et l’enseignement tiré de la nature.

R.3 : Bien qu’une liste complète de propositions de mesures de sauvegarde ait été élaborée, les mesures semblent être édictées par les autorités en place sans indication claire de la participation des communautés. Le dossier n’aborde pas non plus les conséquences involontaires de l’inscription, et n’explique pas non plus comment les mesures de sauvegarde proposées résoudraient le problème d’une commercialisation excessive. Les sociétés civiles et les organisations non-gouvernementales sont principalement impliquées dans l’organisation des événements, mais le mode de leur participation à la mise en œuvre des mesures de sauvegarde n’apparaît pas clairement. Une attention considérable est apportée au développement socio-économique et pas assez aux retombées néfastes possibles de l’inscription, telles qu’une commercialisation excessive.

R.4 : Le dossier explique qu’un Comité national pour la sauvegarde et la promotion du patrimoine culturel immatériel a été créé et mentionne la présence d’acteurs de l’État. Cependant, il n’explique pas de façon complète le rôle des communautés, des groupes et des individus, hormis dans une référence à l’Association du Myanmar pour le thanakha, qui représente des agriculteurs, des producteurs et des exportateurs dans différentes communautés de cultivateurs. Les représentants de ces communautés dans les ateliers ne sont pas clairement définis. Bien qu’il y ait une référence aux comités de travail sur le patrimoine culturel immatériel participant aux activités de recherche et de sensibilisation, il n’apparaît pas clairement comment ils ont été inclus et comment les praticiens et les détenteurs ont été impliqués. De même, il ne ressort pas clairement de quelle façon tous les composants d’un consentement libre, préalable et éclairé ont été établis en relation avec les communautés, les groupes et les individus concernés.

R.5 :  Le dossier stipule que l’élément fait partie de la Liste du patrimoine culturel immatériel national du Myanmar, administré par le Département d’archéologie et Musée national, Ministère des affaires religieuses et de la culture. L’élément a été inclus par le biais d’une notification gouvernementale en mars 2020, et l’élément ainsi que la liste seront examinés et actualisés tous les deux ans. Ces contrôles seront réalisés par des experts nationaux et régionaux lors d’une réunion de coordination annuelle et au moyen d’une évaluation de l’élément, par le biais de travaux de recherche qui seront soumis au Comité national pour la sauvegarde et la promotion du patrimoine culturel immatériel. Les informations sur l’élément semblent avoir été recueillies par une équipe exclusivement académique et il n’apparaît pas clairement comment les communautés, les groupes et les individus concernés ont participé au processus.

  1. Décide de renvoyer la candidature de la pratique de la culture du thanaka au Myanmar à l’État partie soumissionnaire et l’invite à resoumettre la candidature au Comité pour examen au cours d’un cycle ultérieur;
  2. Invite en outre l’État partie à éviter les approches descendantes à tous les stades de la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, en veillant à ce que les communautés, groupes et individus concernés soient au cœur de toutes les initiatives de sauvegarde et que leur consentement libre, préalable et éclairé joue un rôle central pour la préparation du dossier de candidature ;
  3. Rappelle l’importance d’utiliser un vocabulaire en adéquation avec l’esprit de la Convention et d’éviter des expressions telles que « caractère unique » qui peuvent sembler introduire une hiérarchie entre les expressions du patrimoine vivant ;
  4. Rappelle également à l’État partie d’accorder une attention particulière à la qualité linguistique des dossiers soumis à l’avenir ;
  5. Encourage l’État partie, lorsqu’il soumettra des dossiers de candidature à l’avenir, à éviter les lettres de consentement standardisées ;
  6. Encourage en outre l’État partie à porter une attention particulière à l’impact d’une commercialisation excessive dans le cadre de la sauvegarde de l’élément, afin d’empêcher un risque de décontextualisation ;
  7. Félicite l’État partie d’avoir utilisé la plantation de l’arbre thanakha dans le cadre d’un reverdissement de zone aride, et d’avoir reconnu son potentiel dans le cadre du développement socio-économique.

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