Au Kirghizstan, les pratiques rituelles traditionnelles associées aux sites sacrés ont été négligées en raison de l'évolution rapide de la société et d’un manque de reconnaissance sociale. Pour remédier à cette situation, des praticiens des rituels, des pèlerins et des gardiens ont travaillé ensemble à la création d’un inventaire destiné à sauvegarder ces pratiques. Cette initiative a permis de documenter environ 1 230 sites sacrés et 35 rituels pour l’inventaire national du patrimoine vivant, de former plus de 85 membres des communautés aux méthodes d’inventaire et d’élaborer un manuel pour la sauvegarde. En outre, des vidéos présentant des rituels ont été diffusées dans tout le pays. Ces efforts ont mis en évidence l’importance de la collaboration entre les ONG, le gouvernement, les universités et les médias, en autonomisant les communautés et leur donnant les moyens d’agir pour renforcer leur identité culturelle.
© Cholpomai UG, Aigine CRC, 2019
Quel était le besoin ?
Les pèlerinages vers les sites sacrés et les pratiques rituelles, qui constituent un élément déterminant de la culture nomade, font partie intégrante de l’identité culturelle et de l’héritage du peuple kirghize, façonnant leurs attitudes les uns envers les autres et la nature. Bien qu’interdits pendant l’ère soviétique, ces rituels ont été transmis et sont toujours pratiqués par de nombreux pèlerins. Cependant, les rituels étaient peu documentés et n’étaient pas considérés comme importants pour le pays. En outre, les changements sociaux rapides liés à l’urbanisation et aux réseaux sociaux, ainsi que la marginalisation sous l’influence de mouvements religieux radicaux, menaçait leur transmission aux jeunes générations. L’Aigine Cultural Research Center a entrepris, en étroite collaboration avec les communautés kirghizes, la documentation et l’identification des sites sacrés et des pratiques rituelles qui y sont associées.
« L’implication des communautés dans la conception du projet garantit que les problèmes identifiés et les mesures de sauvegarde choisies reflètent véritablement les besoins et les préférences des membres des communautés et des autres parties prenantes, car ce sont eux qui connaissent la situation réelle de l’intérieur. »
NGO Aigine Cultural Research Center
© Cholpomai UG, Aigine CRC, 2019
Quelles approches ont été mises en œuvre ?
La méthodologie d’inventaire a été structurée en quatre étapes, couvrant sept provinces du pays :
- L’étape 0 a consisté à former un comité de pilotage composé de représentants des communautés, d’universitaires et d’experts, qui ont procédé à une étude documentaire approfondie et à une évaluation des besoins, identifié les lacunes et planifié les mesures de sauvegarde.
- L’étape I s’est concentrée sur la mise en place de coordinateurs régionaux et de groupes de travail locaux dans chaque province participante. L’accent a été mis sur le renforcement des capacités des participants en matière de méthodes d’inventaire et sur la préparation du travail de terrain dans les sites sacrés sélectionnés.
- L’étape II comprenait des ateliers sur place dans les sites sacrés, où les praticiens locaux pouvaient réévaluer la pertinence des mesures prévues. Des photos et des vidéos pour la documentation ont été produites, ainsi qu’une première version du manuel pour la sauvegarde. Cette étape a également donné lieu à des campagnes de sensibilisation en collaboration avec le ministère de la culture.
- L’étape III s’est concentrée sur la finalisation du manuel pour la sauvegarde, en intégrant les commentaires des groupes de travail. Le manuel embarque les lecteurs en leur proposant un pèlerinage virtuel à travers les sites sacrés (voir lien ci-dessous).
Ce processus a été soutenu par l’assistance internationale du Fonds du patrimoine culturel immatériel de la Convention de 2003 (2018-2020).
« L’inscription à l’inventaire donne beaucoup d’espoir aux membres de la communauté pour sauvegarder leurs pratiques du patrimoine vivant. En outre, les activités de sensibilisation, notamment la publication du manuel, contribuent grandement à la compréhension, au dialogue et à l’acceptation des rituels anciens et des pèlerinages en tant que patrimoine culturel immatériel des communautés. »
NGO Aigine Cultural Research Center
© Cholpomai UG, Aigine CRC, 2019
Comment cela a-t-il fonctionné ?
Le processus d’inventaire a permis de former plus de 85 membres des communautés et d’autres acteurs dans le cadre de sept ateliers. Quelque 1 230 sites sacrés et 35 rituels ont été répertoriés en vue de leur inclusion dans l’inventaire national, et le manuel pour la sauvegarde a été publié en russe et en kirghize. En outre, neuf vidéos présentant des sites sacrés, des pratiques rituelles et des récits des communautés ont été diffusées en ligne et à la télévision nationale (voir ci-dessous).
La collaboration avec les communautés locales, et les partenaires institutionnels, y compris la radio-télévision kirghize, a été cruciale pour améliorer la visibilité et la reconnaissance de ces pratiques. Ces efforts ont permis de renforcer le réseau de praticiens, de développer leurs capacités et de les sensibiliser à l’importance de leur patrimoine. Le processus d’inventaire a fourni aux détenteurs une base solide pour pratiquer avec fierté leur patrimoine vivant. Il a outillé les communautés en renforçant leur estime de soi, leur identité et leur sentiment d’appartenance. En outre, le manuel pour la sauvegarde sert désormais de ressource pratique pour l’intégration du patrimoine vivant dans l’éducation et la promotion de la transmission intergénérationnelle.
© Cholpomai UG, Aigine CRC, 2019
Comment la communauté a-t-elle été impliquée?
Avec la coordination et le soutien technique de l’Aigine Cultural Research Centre, les membres des communautés ont participé à toutes les activités, y compris l’identification, la recherche, l’élaboration de mesures de sauvegarde, la révision du manuel, la production de vidéos, etc. Les communautés ont également fait partie du comité de pilotage et des représentants de chaque province ont été nommés coordinateurs régionaux. Ils ont proposé les sites sacrés à inventorier et ont sélectionné des participants pour les ateliers, notamment des gardiens de sites sacrés, des guérisseurs traditionnels, des chanteurs épiques, des pèlerins, des universitaires et des experts. Au cours des ateliers, les participants ont identifié de façon collaborative les risques et les menaces qui pèsent sur les sites sacrés et les pratiques de pèlerinage sélectionnés et ont élaboré des mesures de sauvegarde pour y faire face.
Contacts pour partager des expériences
Aigine Cultural Research Center
93 Toktogul St., 720040, Bishkek, Kirghizistan
Langues de contact : russe, kirghize et anglais
+996 312 664832 ; +996 312 661951
office@aigine.kg, aiza@aigine.kg