L’organe national en charge de la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel est le Ministère de la culture et des sports, qui agit par l’intermédiaire de sa Dirección Técnica de Patrimonio Intangible (Direction technique du patrimoine immatériel – DTPI) et de sa Dirección General de Desarrollo Cultural y Fortalecimiento de las Culturas (Direction générale du développement culturel et du renforcement des cultures). D’autres institutions sauvegardent le patrimoine culturel immatériel des différents groupes du pays, p. ex. la commission culturelle de la Municipalité de Quetzaltenango (culture maya-quiche) et l’Institut Pixab Chi (ouest du Guatemala). Une nouvelle Loi du patrimoine culturel immatériel est en cours d’élaboration. Les politiques du patrimoine culturel du pays constituent une « vision d’ensemble » qui permet aux autorités nationales et/ou municipales de reconnaitre la contribution des détenteurs du patrimoine culturel immatériel à l’identité nationale et au dialogue interculturel. Une Politique du patrimoine culturel immatériel a été élaborée en 2007 avec le soutien de l’UNESCO et la participation de 45 organisations sociales issues des quatre principaux groupes ethniques du pays. En 2013, au terme des six premières années de sa mise en œuvre, cette politique du patrimoine culturel immatériel a fait l’objet d’un bilan.
Les actions de formation à la gestion du patrimoine culturel immatériel sont soutenues par la DTPI au niveau des municipalités, pour les entités responsables de la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel au niveau local. Le Ministère de la culture a deux centres de recherche spécialisés dans la recherche et la documentation dans les domaines du patrimoine culturel et du développement culturel. En outre, la recherche consacrée au patrimoine culturel immatériel est menée par le Centro de estudios folklóricos (Centre d’études folkloriques – CEFOL) et l’Instituto de Estudios Interétnicos (Institut d’études interethniques – IDEI), deux entités de l’université de San Carlos. L’École d’histoire (qui délivre des diplômes d’anthropologie et d’archéologie) participe également à la conception et la réalisation de travaux de recherche sur le patrimoine culturel immatériel, et élabore des méthodologies de recherche adaptées. La télévision maya diffuse des documentaires sur différentes communautés, plusieurs autres télévisions en font de même.
Une Unité des inventaires a été créée et un formulaire d’enregistrement des inventaires ainsi que sa méthodologie d’utilisation ont été élaborés en 2012 par des experts nationaux, des anthropologues et des historiens, avec l’aide de l’IPHAN (Brésil). Il importe de souligner que l’inventaire est envisagé comme un outil destiné à établir un lien entre l’élément et les plans de sauvegarde requis. Une procédure spécifique est en cours d’élaboration pour l’inventaire des éléments du patrimoine culturel immatériel précédemment déclarés, elle prévoit un exercice d’évaluation destiné à définir l’état actuel de ces éléments du patrimoine culturel immatériel.
Les critères requis pour l’inclusion d’un élément du patrimoine culturel immatériel dans l’inventaire sont les suivants : il a trait au patrimoine culturel immatériel tel que défini par la législation nationale ou la Convention de 2003 pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel ; la demande d’inclusion est accompagnée d’un document établissant le consentement libre, préalable et informé des détenteurs et des communautés participantes ; la communauté participante nomme des détenteurs de la tradition culturelle ou des représentants culturels pour soutenir la procédure de collecte des données sur le terrain ; et une révision des espaces ainsi qu’une validation et une analyse de l’état actuel de l’élément inventorié ont été définies permettant ainsi une identification des risques, menaces et problèmes potentiels liés aux mesures de sauvegarde. Sur la base des informations recueillies, les mesures de sauvegarde sont évaluées ainsi que les capacités des groupes et autorités à les mettre en œuvre. Des accords tripartites sont signés entre les autorités locales, les organisations communautaires et les détenteurs des traditions culturelles.
Les inventaires sont participatifs et un consensus est établi avec la population locale avant que l’inventaire ne soit réalisé. La mise en œuvre des inventaires encourage la participation de la communauté et débouche souvent sur l’évaluation et la reconnaissance par la communauté de sa propre culture. Une fois l’élément inventorié, il est validé et analysé avec les détenteurs de la tradition culturelle, la communauté participante et les autorités locales ou municipales. L’objectif est de donner aux populations les capacités de jouer un rôle moteur dans les mesures de sauvegarde proposées.
S’agissant des mesures destinées à promouvoir la fonction du patrimoine culturel immatériel dans la société, celui-ci est envisagé comme un élément important pour la construction de l’identité et la valorisation de la diversité culturelle et des différences entre les 23 groupes ethniques des populations maya, xinca, garifuna et ladino. Par exemple, le prix Pawajtun est remis à deux artisans exceptionnels en reconnaissance de leur contribution à l’identité nationale et à la transmission de leurs connaissances et techniques.
Parmi les mesures prises pour assurer la reconnaissance, le respect et la mise en valeur du patrimoine culturel immatériel, on peut citer la production par la télévision maya de documentaires sur le patrimoine culturel immatériel des Garifunas d’ascendance africaine et des communautés xinca et maya, créant ainsi des opportunités de dialogue avec la communauté sur la culture vivante qui s’exprime dans les fêtes, les activités culturelles, les rituels, etc. Depuis 2012, la DTPI a organisé toute une série d’ateliers d’information et de sensibilisation destinés aux jeunes filles, aux jeunes, aux adultes, aux détenteurs de traditions culturelles et aux communautés intéressées. Les medias locaux ont contribué à la diffusion de ces informations. La Comisión de Lugares Sagrados de los Pueblos Indígenas (Commission des lieux sacrés des peuples autochtones) établit actuellement une carte géoréférencée et a conçu un manuel des utilisateurs des lieux sacrés qui cartographie les énergies situées dans les montagnes, les collines, les rivières, les lacs, les sites archéologiques, les parcs, etc. Par ailleurs, des discussions se sont tenues avec des archéologues à propos des plans de gestion des sites et des parcs dans lesquels des valeurs immatérielles sont évaluées au côté d’éléments matériels.
S’agissant de la coopération bilatérale, sous-régionale, régionale et internationale, le Guatemala est membre du Centre régional pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel d’Amérique latine (CRESPIAL), un centre de catégorie 2 sous les auspices de l’UNESCO, basé au Pérou, qui organise des activités de renforcement des capacités, permet l’échange d’expériences et promeut une vision intégrée du patrimoine culturel immatériel. Le CRESPIAL a également soutenu financièrement des projets de sauvegarde mis en œuvre par trois organisations nationales : la culture du groupe ethnique chuj de San Mateo Ixtatan à Huehuetenango, le droit d’utiliser la langue xinca à Jalapa et le sauvetage de la culture garifuna à Livingston. Également dans le cadre du CRESPIAL, le Brésil a coopéré à l’identification de mesures de sauvegarde avec la participation des communautés et la Colombie a renforcé les capacités nationales dans le domaine de l’élaboration des plans de sauvegarde.
Le Guatemala a deux éléments inscrits sur la Liste représentative : La langue, la danse et la musique des Garifunas (intégré en 2008 après avoir été proclamé chef-d’œuvre du patrimoine oral et immatériel de l’humanité en 2001), une inscription multinationale avec Belize, le Honduras et le Nicaragua ; et La tradition du théâtre dansé Rabinal Achí (également intégré en 2008 après avoir été proclamé chef-d’œuvre en 2005). En ce qui concerne l’élément garifuna, l’inscription a constitué un outil stratégique qui a permis une revitalisation de l’élément, une sensibilisation accrue et une grande amélioration de la situation des détenteurs au Guatemala, en particulier, en réduisant la discrimination à leur égard et en accordant à ce groupe marginalisé une reconnaissance nationale. L’inscription a également donné une réelle visibilité au rôle des femmes, détentrices et transmetteuses de l’élément. Le nombre de touristes s’est accru, ce qui représente un revenu complémentaire important pour les familles. S’agissant du Rabinal Achí, l’inscription a également encouragé l’évolution des modèles paternalistes et centralisateurs qui n’assuraient pas la pérennité de l’élément : dans les communautés telles que les Rabinal, qui doivent faire face à une extrême pauvreté et aux effets d’un conflit armé interne, le travail autour du patrimoine culturel immatériel peut constituer une opportunité de développement. Néanmoins, avant l’inscription, les communautés avaient des attentes irréalistes quant aux bénéfices financiers qu’elles pourraient en tirer. Des efforts déployés avec patience et une grande attention ont permis de mettre en œuvre des mesures de sauvegarde plus réalistes.
Pour la préparation des présents rapports sur les éléments, une équipe basée à Livingston a travaillé directement avec les membres de la communauté garifuna. Les consultations se sont déroulées par téléphone et lors de réunions. Le rapport sur l’élément Rabinal Achí est fondé sur les rapports mensuels soumis par l’association Xajoj Tun. Parallèlement, des réunions ont été organisées avec les détenteurs et les informations ont été rassemblées par le Ministère de la culture.