Décision du Comité intergouvernemental : 10.COM 10.C.2

Le Comité,

  1. Rappelant le chapitreV de la Convention and le chapitre I des Directives opérationnelles,
  2. Ayant exami le document ITH/15/10.COM 10.c ainsi que la demande d’assistance internationale n  00888,
  3. Prend note que le Kenya a demandé une assistance internationale pour la sauvegarde de Enkipaata, Eunoto et Olng’esherr, trois rites de passage masculins de la communauté masaï :

Les trois rites masculins de la communauté masaï représentent chacun une étape dans le passage des garçons à l’âge adulte – un processus appelé moranisme impliquant la transmission de connaissances autochtones incluant rituels, légendes, traditions et savoir-faire vitaux des Masaïs. Enkipaata est la première phase de l’initiation des garçons, Eunoto le rasage rituel des morans avant leur isolement dans la brousse à des fins d’entraînement et Olng’esherr, la cérémonie lors de laquelle on mange de la viande et qui marque la fin du statut de moran et l’acquisition de celui de sage. Les rites impliquent la communauté entière et mêlent chants, contes populaires, proverbes, énigmes et événements, conférant ainsi à la communauté masaï un sens d’identité et de continuité culturelles. Les modes de transmission traditionnels sont néanmoins en perte de vitesse considérable depuis le début des années 1980, du fait d’une fréquence et d’une participation amoindries, car la plupart des garçons restent aujourd’hui chez eux et reçoivent une éducation formelle. Afin de sauvegarder cette pratique, le projet prévoit l’organisation d’ateliers ayant pour but de promouvoir les inventaires mobilisant la communauté masaï autour de leur patrimoine culturel immatériel, de rassemblements communautaires entre anciennes et jeunes générations pour apporter à ces dernières les connaissances et les savoir-faire nécessaires à la pratique et à la préservation de la tradition, la sensibilisation des jeunes à son importance, la conduite d’exercices de cartographie pour protéger les espaces naturels et les lieux associés et enfin, des travaux de recherche et de documentation à des fins de transmission future.

  1. Prend note en outre que cette assistance concerne l’appui à un projet conduit au niveau national visant à la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, conformément à l’article 20 de la Convention, et qu’elle prend la forme de l’octroi d’un don, conformément à l’article 21 alinéa (g) de la Convention ;
  2. Prend également note que le Kenya a demandé une allocation de 144 430 dollars des États-Unis du Fonds du patrimoine culturel immatériel pour la mise en œuvre de ce projet ;
  3. Décide que, d’après les informations contenues dans le dossier nº 00888, la demande répond comme suit aux critères d’octroi d’assistance internationale définis dans le paragraphe 12 et dans les considérations supplémentaires du paragraphe 10 des Directives opérationnelles:

Critère A.1 : Mis à part les rassemblements éducatifs à court terme des anciens et des jeunes, la demande ne parvient pas à démontrer une participation active de la communauté masaï dans la préparation, la mise en œuvre, l’évaluation ou encore le suivi du projet ; le rôle central est attribué à un service gouvernemental et à une organisation non gouvernementale nationale consacrée à la conservation de la biodiversité et à la promotion de la culture masaï, sans que le lien entre cette organisation et la communauté et la mesure dans laquelle, et par quel biais, elle peut agir en leur nom ne soient explicites ;

Critère A.2 : Le budget fait apparaître des divergences entre objectifs, activités, calendrier et parties impliquées dans le projet ; il révèle en particulier une organisation de haut en bas avec un encadrement très lourd, des écarts entre activités planifiées et résultats escomptés, un manque d’informations sur les acteurs désignés pour mener à bien les tâches spécifiques et une séparation des Masaïs en neuf sections non reliées ;

Critère A.3 : Orienté en principe vers la sauvegarde de trois rites de passage masculins, le projet oscille entre le renforcement de capacités en vue de la sauvegarde et en vue des inventaires, sans que le lien entre les deux ne soit éclairci ; de plus, la description des trois rites souffre d’un manque de détails ne permettant pas aux lecteurs de saisir l’importance des espaces et des lieux dont l’identification est prévue et qui sont censés être mis sous la protection des communautés ; le calendrier révèle que la durée de trois ans du projet ne s’applique qu’aux parties prenantes, tandis que la communauté est divisée en neuf sections, si bien que pour chaque communauté, le projet ne dure qu’un an ; en outre, ce projet ne facilite pas la communication entre ces différentes sections ;

Critère A.4 : Étant donné le manque de clarté et de cohérence entre les principaux objectifs, les résultats escomptés, les activités planifiées, le calendrier et les partenaires impliqués ainsi que le manque de preuves d’une participation active de la communauté masaï dans sa conception et sa conduite, le projet proposé ne démontre pas de manière adéquate comment il pourrait contribuer à la durabilité des trois rites masculins ; de même, les rassemblements éducatifs des communautés entre anciens et jeunes peuvent difficilement assurer un suivi efficace dans la mesure où un seul rassemblement est prévu dans chacune des neuf sections, soit un par année (d’après le budget) ou un au total au cours des trois ans du projet (d’après le calendrier) ; l’impression générale est celle d’un projet à faible potentiel de durabilité ;

Critère A.5 : L’État partie s’est engagé à couvrir les frais de participation de quatre agents à l’ensemble des réunions et des ateliers et à identifier des lieux et des espaces, tandis que la contribution revenant à la communauté inclut les rassemblements destinés à éduquer les jeunes sur l’importance des trois rites masculins ;

Critère A.6 : La demande doit être étoffée en termes d’explications (plutôt que d’assertions) sur la façon dont le projet pourrait aider à renforcer les capacités de la communauté soit à inventorier son patrimoine culturel immatériel soit à sauvegarder l’élément ; l’atelier de quatre jours portant sur les inventaires avec la participation des communautés est important mais insuffisamment décrit et de portée limitée, tandis que le transfert de connaissances liées à l’élément s’appuie sur les propres ressources humaines, techniques et financières de la communauté et se voit cantonné à chacune de ses sections séparées ; le renforcement des capacités des parties prenantes ne peut être évalué dans la mesure où ces dernières opèrent principalement dans des domaines autres que la préservation du patrimoine culturel immatériel ou ne sont pas clairement identifiées ;

Critère A.7 : Le Kenya a reçu à deux reprises une assistance internationale provenant du Fonds du patrimoine culturel immatériel, la première pour la sauvegarde des « Traditions et pratiques associées aux Kayas dans les forêts sacrées des Mijikenda » (2011- en cours ; 126 580 dollars des États-Unis) et la seconde pour préparer un dossier de candidature portant sur les « Rituels et pratiques associés au sanctuaire de Kit Mikayi chez les communautés luo au Kenya » (2013-2015 ; 17 668 dollars des États-Unis) ; de plus, le pays a mis en œuvre trois projets soutenus par le Fonds-en-dépôt UNESCO/Japon : « Sauvegarde des habitudes alimentaires traditionnelles de deux communautés au Kenya » (2009-2013), « Documentation photographique du patrimoine immatériel au Kenya » (2010-2011) et « Sauvegarde des arts du spectacle traditionnels somali » (2008-2009) ; le travail prévu dans les contrats relatifs à ces projets a été effectué conformément au règlement de l’UNESCO et tous les projets ont été achevés, à l’exception du projet concernant les Kayas, qui rencontre des retards considérables et pour lequel le Secrétariat est en contact avec l’État partie afin de trouver une solution pour résoudre le problème ;

Considération 10(a) : Le projet a une portée locale et implique des partenaires de mise en œuvre locaux et nationaux ;

Considération 10(b) : La demande n’aborde pas la question de savoir si le projet peut avoir un effet multiplicateur ou encourager des contributions techniques ou financières venant d’autres sources ; un complément d’information serait nécessaire pour expliquer les effets multiplicateurs susceptibles d’émerger d’un partenariat entre ce projet et un autre consacré à la culture et à la santé reproductive des Masaïs.

  1. Reconnaît le besoin de sauvegarder les trois rites de passage masculins de la communauté masaï et apprécie l’engagement de l’État partie ;
  2. Invite l’État partie à soumettre dans les meilleurs délais une nouvelle demande, révisée conformément aux recommandations de l’Organe d’évaluation et aux conclusions formulées ci-dessus ;
  3. Délègue son autorité au Bureau pour prendre toute décision appropriée concernant une telle demande d’assistance internationale révisée émanant du Kenya pour la sauvegarde de Enkipaata, Eunoto et Olng’esherr, trois rites de passage masculins de la communauté masaï.

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