Le Comité,
- Prend note que le Maroc a proposé la candidature de Gnaoua (n 01170) pour inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :
Le terme gnaoua se rapporte à un ensemble de productions musicales, de performances, de pratiques confrériques et de rituels à vocation thérapeutique où le profane se mêle au sacré. Gnaoua est avant tout une musique confrérique soufie généralement associée à des paroles à caractère religieux, qui invoque les ancêtres et les esprits. Pratiquée à l’origine par des groupes et des individus issus de l’esclavage et de la traite négrière remontant au moins au XVIe siècle, la culture gnaoua fait aujourd’hui partie des multiples facettes de l’identité culturelle marocaine. Les gnaoua, notamment ceux de la ville, pratiquent un rituel de possession thérapeutique sous forme d’une veillée de rythmes et de transe où se mêlent des pratiques africaines ancestrales, des influences arabo-musulmanes et des manifestations culturelles berbères autochtones. Les gnaoua de la campagne organisent des repas collectifs offerts aux saints maraboutiques. Certains gnaoua des villes utilisent un instrument de musique à cordes et des crotales, alors que ceux de la campagne ont plus particulièrement recours aux grands tambours et aux crotales. Dans les villes, les costumes sont colorés et brodés tandis que les costumes du monde rural sont blancs et accompagnés d’accessoires. Le nombre de groupes confrériques et de maîtres musiciens ne cesse de s’accroitre dans les villages et les grandes villes du Maroc. Les groupes gnaoua forment des associations et organisent des festivals locaux, régionaux, nationaux et internationaux toute l’année. Cela permet aux jeunes générations de découvrir les paroles et les instruments ainsi que les pratiques et rituels liés à la culture de Gnaoua.
- Estime que, d’après les informations contenues dans le dossier, la candidature satisfait aux critères d’inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité comme suit :
R.1 : Gnaoua procure à ses adeptes et praticiens un sentiment très fort de valorisation identitaire au sein de la société et constitue ainsi un lien social qui non seulement unit les membres d’un même groupe, mais aussi les relie aux autres habitants de la ville, du village ou de la région. Gnaoua revêt également des significations culturelles multiples et profondes. Les chants, les rythmes et les pratiques gnaoua incarnent une culture liée à l’histoire de l’esclavage et à la traite négrière en Afrique du Nord. Les connaissances et savoir-faire liés à la culture gnaoua se transmettent de manière informelle au sein de la famille ou dans le cercle social proche des familles gnaoua.
R.2 : L’inscription de Gnaoua inciterait d’autres communautés à travers le monde qui détiennent des pratiques musicales similaires à redoubler d’efforts pour sauvegarder leur patrimoine culturel immatériel. Elle encouragerait et renforcerait le dialogue et les échanges entre les groupes gnaoua aussi bien au niveau local et régional qu’à l’échelle nationale, grâce à la multiplication des rencontres et des festivals locaux, régionaux et nationaux, favorisant ainsi la créativité culturelle.
R.3 : La viabilité de Gnaoua est assurée du fait que l’élément est profondément ancré dans la pratique des communautés et que sa transmission est garantie. Ses détenteurs ainsi que l’État partie ont pris de nombreuses mesures pour assurer sa pérennité. Les mesures de sauvegarde ont été élaborées avec les communautés concernées et s’articulent autour de cinq axes principaux : documentation et archivage des données ; recherches académiques et universitaires ; communication et diffusion médiatique ; sensibilisation ; et assistance financière et logistique. Les organismes d’État marocains soutiendront la mise en œuvre des mesures de sauvegarde proposées en finançant directement les activités.
R.4 : La communauté a joué un rôle clé dans toutes les étapes du processus. L’association Yerma-Gnaoua (dédiée à la promotion et à la diffusion du patrimoine gnaoua) a lancé l’initiative de dépôt de candidature en 2013. Depuis, l’État partie et les communautés concernées ont pris part à des réunions, ateliers et activités pour sauvegarder l’élément, élaborer le dossier de candidature et définir les mesures de sauvegarde.
R.5 : Gnaoua a été inscrit dans l’Inventaire et la documentation du patrimoine culturel du Maroc en 2015. Ce registre est mis à jour dès que le besoin se présente. Le processus a été mené avec la participation des communautés lors des festivals et des événements spéciaux et grâce au soutien de l’association Yerma-Gnaoua. La Direction du patrimoine culturel du Ministère de la culture est l’organisme responsable de la gestion et de la mise à jour de l’inventaire.
- Décide d’inscrire Gnaoua sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité ;
- Encourage l’État partie à accorder plus d’importance à l’égalité des genres dans la sauvegarde de l’élément en reconnaissant le rôle actif des femmes dans sa pratique ;
- Félicite l’État partie d’avoir fourni des preuves du consentement de la communauté par le biais de formats personnalisés plutôt que standardisés, notamment en utilisant des vidéos.