Le Sbek Thom, théâtre d’ombres khmer
Inscrit en 2008 (3.COM) sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité (originellement proclamé en 2005)
Le Sbek Thom, théâtre d’ombres khmer, met en scène de grandes marionnettes non articulées, en cuir ciselé, pouvant mesurer jusqu’à deux mètres de haut. Antérieur à la période angkorienne, il est considéré, à l’instar du Ballet royal et du théâtre masqué, comme un art sacré. Les représentations, dédiées aux divinités, n’étaient données que trois ou quatre fois par an pour des occasions spécifiques comme le Nouvel an khmer, l’anniversaire du roi ou la vénération de personnages illustres. Après la chute d’Angkor au quinzième siècle, le théâtre d’ombres a dépassé le cadre rituel pour devenir une forme artistique, sans toutefois perdre sa dimension cérémonielle.
Les marionnettes sont taillées dans une seule pièce de cuir selon un cérémonial spécifique à chaque dieu ou divinité représenté. Les peaux sont colorées à l’aide d’une solution à base d’écorce de kandaol. L’artisan dessine la figurine sur la peau tannée, puis la cisèle et la peint avant de la fixer sur deux tiges de bambou qui permettront au danseur d’animer la marionnette.
Les représentations ont généralement lieu la nuit, en plein air, aux abords d’une rizière ou d’une pagode. Un grand drap blanc est tendu entre deux hauts mâts de bambou devant un grand feu ou, désormais, des projecteurs. Les silhouettes des marionnettes sont projetées en ombre chinoise sur cet écran blanc. Le manipulateur lui donne vie en effectuant des pas de danse précis et spécifiques. Un orchestre et deux narrateurs accompagnent l’action dramatique. Inspirées du Reamker, la version khmère du Ramayana, les représentations mettent en scène des extraits de cette épopée. Elles peuvent s’étaler sur plusieurs nuits consécutives et nécessiter jusqu’à 160 marionnettes pour un même spectacle. Nombre de ces figures ont été détruites sous le régime répressif des Khmers rouges qui a quasiment anéanti cet art sacré. Depuis 1979, le Sbek Thom retrouve progressivement vie grâce aux rares artistes survivants. À ce jour, trois théâtres d’ombres ont pu renaître de leurs cendres et assurent la transmission des connaissances et savoir-faire concernés, notamment ceux liés à la confection des marionnettes.