Quel était le besoin ? 

Jusqu’à il y a 50 ans, les arts, les métiers et les connaissances traditionnelles des Totonaques étaient transmis de manière informelle au sein des ménages et des familles. Cependant, les mutations socioculturelles, couplées à une baisse de l’intérêt et du soutien pour l’enseignement des pratiques autochtones, ont affaibli la vitalité de nombreuses expressions du patrimoine vivant des Totonaques. Une première évaluation des besoins a été réalisée en 2006, lorsque les aînés Totonaques ont exprimé leur crainte de perdre leurs traditions culturelles, soulignant l’absence de modèle public de formation et d’enseignement de leurs traditions, ainsi que la non-reconnaissance de la production créative autochtone dans l’enseignement général à Veracruz.

« Aujourd’hui, après onze ans de travail, de recherche et de réflexion sur la réappropriation et la décolonisation, nous avons pu renforcer ce qui était en danger ou menacé. Le travail n’est pas terminé, car plus nous avançons dans la régénération et la revitalisation de la culture, plus nous trouvons des éléments qui demandent du travail et de l’attention… Cependant, il y a beaucoup de progrès et de résultats. Aujourd’hui, les grands-mères, les jeunes, les garçons, les filles, les adolescents et les adultes portent l’identité totonaque avec fierté, pas comme avant, quand nous avions honte et refusions d’être Totonaques. Aujourd’hui, nous sommes davantage conscients, nous avons un plus grand respect et une plus grande appréciation de ce que représente notre héritage totonaque. »
Le directeur du Centre des arts autochtones – extrait du livre « Célébrer le patrimoine vivant des peuples autochtones »

Quelles approches ont-elles été mises en oeuvre ?

Le Centre des arts autochtones (CAI), ou Xtaxkgakget Makgkaxtlawana (« la splendeur de l’artiste ») en langue totonaque, a été créé en 2006 en tant qu’organisation de la société civile à l’initiative et après consultation de plusieurs organisations totonaques, telles que le Conseil suprême Totonaque, le Conseil des anciens, le Conseil rituel des Voladores et d’autres organismes représentant des guérisseurs et des potiers traditionnels, des brodeurs, des cuisiniers traditionnels et plusieurs artistes.

Reflétant la structure d’un établissement traditionnel, le CAI est composé de maisons-écoles spécialisées où les apprentis sont formés à différents arts totonaques, tels que la sculpture sur bois, la fabrication de meubles et de jouets, la plantation et la récolte du coton, les textiles, la guérison traditionnelle, la poterie, la musique, le théâtre, la cuisine, les médias et la radio, et bien d’autres encore. Les apprentis sont encouragés à expérimenter de nouveaux matériaux et à explorer des expressions esthétiques innovantes.

Enraciné dans la cosmovision totonaque, le modèle du CAI considère l’apprentissage comme une préparation à la vie ainsi qu’à la vie dans la communauté. Les apprentis reçoivent en outre des indications sur le sens des pratiques créatives liées à la spiritualité dans la maison des grands-mères et des grands-pères sages (appelée « Kantillán »), où sont transmises les valeurs fondamentales, la philosophie et la sagesse de la culture totonaque.

« Xtaxkgakget Makgkaxtlawana : le Centre des arts autochtones et sa contribution à la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel du peuple totonaque de Veracruz, Mexique » a été sélectionné pour le Registre de Bonnes Pratiques de sauvegarde en 2012.

« Le partage de cette tradition requiert l’effort collectif de nombreuses personnes. Elle est soutenue par le dévouement de chacun. Nous embrassons, nourrissons et assurons le bien-être de notre pratique ancestrale. C’est une responsabilité partagée par notre communauté. »
Un représentant de Veracruz au Conseil des Voladores – extrait du livre « Célébrer le patrimoine vivant des peuples autochtones »

Comment cela a-t-il fonctionné?

La création du CAI a favorisé le dialogue entre les organes coutumiers autochtones, renforçant les systèmes organisationnels et de gouvernance des Totonaques.

Aux côtés du Conseil rituel des Voladores, le centre soutient le plan de sauvegarde de la cérémonie rituelle des Voladores, inscrite sur la Liste Représentative, et forme la prochaine génération de voladores par l’intermédiaire de son école (Escuela de Niños Voladores).

Grâce à son approche professionnalisante, le CAI garantit que les connaissances sont transmises dans la pratique et le respect des valeurs et des traditions autochtones, tout en encourageant l’innovation. Il comble une lacune historique critique en promouvant les traditions culturelles des Totonaques et en assurant leur continuité par la professionnalisation des artistes autochtones.

Outre le soutien du gouvernement de l’État de Veracruz, la viabilité financière du centre est désormais assurée par la production et la vente de livres, de vidéos et d’objets artisanaux, ainsi que par l’organisation de spectacles touristiques et de festivals tels que le festival Cumbre Tajín.

Comment la communauté a-t-elle été impliquée ?

La création du CAI est une initiative communautaire impliquant des enseignants traditionnels, des promoteurs culturels et des organisations autochtones. Elle a permis d’identifier les pratiques culturelles clés et les menaces qui pèsent sur celles-ci, guidant ainsi le développement des programmes et la structure des écoles. Ancré dans la gouvernance et la prise de décision collective des Totonaques, le CAI permet aux enseignants et aux dirigeants totonaques de conduire ses programmes, en veillant à ce que les pratiques culturelles soient sauvegardées par leurs praticiens. Cette approche permet la transmission des connaissances traditionnelles tout en donnant aux peuples autochtones un rôle central dans l’élaboration de leur avenir culturel et éducatif, en promouvant l’autodétermination et en soutenant l’organisation sociale coutumière. Le CAI promeut également l’égalité des genres, en travaillant avec les femmes et en les impliquant dans les organes de gouvernance ; aujourd’hui des femmes siègent au Conseil suprême des Totonaques et participent au rituel du vol.

Contacts pour partager des expériences

Centre des arts autochtones
Carretera Poza Rica - San Andrés, Km. 17.5, Municipio de Papantla de Olarte, Veracruz, Mexique. C.P. 93479
Langues de contact : totonaque et espagnol
52 (782) 8217089 ; 52 (782) 8217090 et 52 (782) 8217088
centroartesindigenas@gmail.com
https://www.facebook.com/CentrodelasArtesIndigenas/

Le Centre des arts autochtones a donné son accord à l’UNESCO pour la diffusion de cette bonne expérience de sauvegarde.

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