Le Bureau,
- Rappelant l’article 23 de la Convention ainsi que le chapitre I.4 des Directives opérationnelles relatifs à l’admissibilité et aux critères des demandes d’assistance internationale,
- Ayant examiné le document LHE/20/15.COMBUR/3, ainsi que la demande d’assistance internationale n 01637 présentée par le Kenya,
- Prend note que le Kenya a demandé une assistance internationale pour le projet intitulé Sauvegarde et promotion des traditions menacées des tribus minoritaires du nord du Kenya : une initiative de l’État partie sur les systèmes de savoir autochtones du peuple El-Molo du lac Turkana :
Ce projet de trente mois, qui sera mis en œuvre par les musées nationaux du Kenya, vise à sauvegarder et à promouvoir les systèmes de savoir autochtones menacés du peuple El-Molo du lac Turkana, en mettant l’accent sur les pratiques artisanales et alimentaires traditionnelles. Le projet a trois objectifs clés. Tout d’abord, il a pour objectif de sensibiliser la communauté El-Molo quant à l’importance de ses systèmes de savoirs autochtones et au besoin de les sauvegarder pour les générations à venir. Deuxièmement, il améliorera la transmission des savoirs et des compétences autochtones grâce à des démonstrations d’artisans et de praticiens de l’alimentation traditionnelle. Un espace artistique communautaire sera construit afin de fournir une plateforme d’engagement et de transmission continus. Troisièmement, il vise à stimuler un dialogue national et à élaborer des politiques éclairées sur la situation critique du peuple El-Molo. Dans le cadre de cette initiative, une exposition sera organisée dans les musées nationaux du Kenya afin d’informer le public sur les systèmes de savoirs autochtones de la communauté El-Molo. Dans le cadre de ce projet, deux ateliers communautaires seront organisés. Le premier prendra la forme d’une réunion de trois jours pour trente porteurs de ces systèmes de savoirs autochtones, notamment des praticiens impliqués dans le perlage, la vannerie, le tissage et les techniques de conservation des aliments, afin d’illustrer l’importance de transmettre les savoirs autochtones derrière ces pratiques. Le second sera un atelier de démonstration pour dix praticiens qualifiés et cinquante jeunes, visant à encourager la jeune génération à acquérir les compétences et les connaissances liées à l’artisanat et à la conservation des aliments. Après ce projet, il est prévu que les jeunes générations continuent d’acquérir et de perpétuer les savoirs et les compétences autochtones, et que la publicité qui en résultera déclenchera l’élaboration de politiques de sauvegarde et d’inventaire appropriées.
- Prend note en outre que cette assistance concerne l’appui à un projet mis en œuvre au niveau national, conformément à l’article 20 (c) de la Convention, et qu’elle prend la forme d’octroi d’un don, conformément à l’article 21 (g), de la Convention ;
- Prend également note que le Kenya a demandé une allocation d’un montant de 94 315 dollars des États-Unis du Fonds du patrimoine culturel immatériel pour la mise en œuvre de ce projet ;
- Décide que, d’après les informations fournies dans le dossier n 01637, la demande satisfait aux critères d’octroi de l’assistance internationale énoncés aux paragraphes 10 et 12 des Directives opérationnelles comme suit:
Critère A.1 : La demande démontre le rôle central de la communauté d’El-Molo dans la planification, la mise en œuvre et le suivi du projet. La participation des communautés est favorisée notamment par un large processus de consultation avec les gardiens des traditions, les responsables communautaires et les praticiens tout au long du projet, des réunions de sensibilisation jusqu’aux ateliers communautaires. Toutefois, il aurait été important de mieux démontrer comment les communautés pourront contribuer à l’identification et au développement de mesures de sauvegarde appropriées de leurs savoirs et de leurs compétences autochtones menacés.
Critère A.2 : Le budget est présenté de manière structurée. Toutefois, les modalités de mise en œuvre de certaines des activités proposées, telles que l’étude documentaire ou la création d’un espace artistique communautaire, ne sont pas suffisamment détaillées dans la demande. En outre, quelques erreurs de calcul ont été remarquées ainsi qu’un recours trop systématique aux montants forfaitaires pour un certain nombre de dépenses prévues. Compte tenu de tous ces éléments, il n’est pas possible d’évaluer pleinement la pertinence du montant demandé.
Critère A.3 : La demande présente huit activités : des activités visant à sensibiliser la communauté quant à l’importance de la sauvegarde de son patrimoine vivant, et des activités visant spécifiquement à améliorer la visibilité des savoirs et des compétences artisanales autochtones en danger de la communauté El-Molo. Les activités proposées ne sont pas clairement encadrées, et certaines activités manquent de détails sur les résultats et effets attendus. Par exemple, le projet prévoit que les activités visant à améliorer la visibilité favoriseront le dialogue au niveau national sur l’importance de la sauvegarde des groupes minoritaires au Kenya tels que la communauté El-Molo. Toutefois, ce résultat attendu semble ambitieux compte tenu de la portée et du calendrier du projet.
Critère A.4 : Le projet prévoit d’inventorier et de promouvoir les systèmes de savoirs autochtones de la communauté concernée afin de les sauvegarder pour la postérité. Toutefois, des informations supplémentaires sont nécessaires sur plusieurs de ces activités, telles que les événements prévus pour améliorer la visibilité. Par exemple, le projet ne démontre pas clairement comment l’exposition permanente à Nairobi contribuera à long terme à l’objectif principal du projet, qui est d’établir une stratégie durable pour la sauvegarde des savoirs autochtones de la communauté El-Molo.
Critère A.5 : L’État demandeur contribuera à hauteur de 31 pour cent du budget global du projet pour lequel une assistance internationale est demandée au Fonds du patrimoine culturel immatériel.
Critère A.6 : Le projet vise à sensibiliser la communauté concernée à la sauvegarde de ses savoirs autochtones. Toutefois, il ne comporte aucun élément spécifique de renforcement des capacités et ne démontre pas clairement comment les ateliers communautaires et les activités de sensibilisation peuvent contribuer au renforcement des capacités de la communauté. Il est donc difficile d’évaluer dans quelle mesure le projet pourrait affecter la capacité de la communauté El-Molo à sauvegarder et à transmettre les savoirs, les compétences et les pratiques autochtones - dans les domaines de l’artisanat et de l’alimentation - et à assurer ainsi leur viabilité. Enfin, des précisions sont nécessaires sur la manière dont le projet pourrait contribuer à renforcer les efforts nationaux de sauvegarde des savoirs autochtones, ainsi que sur certaines actions à fort impact telles que « la formulation des politiques appropriées en faveur (...) du patrimoine El-Molo » et la volonté de « sauver ces communautés de la disparition », comme indiqué dans la demande.
Critère A.7 : Le Kenya a bénéficié de l’assistance internationale du Fonds pour le patrimoine culturel immatériel pour les projets achevés suivants : « Les traditions et pratiques associées aux Kayas dans les forêts sacrées des Mijikenda » (dossier n 00326, 2011-2014, 126 580 dollars des États-Unis), « La documentation et l’inventaire du patrimoine culturel immatériel de la communauté pastorale Samburu du nord du Kenya, particulièrement dans la région de la réserve de biosphère du mont Kulal » (dossier n 01024, 2015-2016, 24 038 dollars des États-Unis), « La promotion des pratiques de poterie traditionnelle dans l’est du Kenya » (dossier n 01021, 2016-2017, 23 388 dollars des États-Unis) et « La sauvegarde de Enkipaata, Eunoto et Olng’esherr, trois rites de passage masculins de la communauté masaï » (dossier n 00888, 2017-2020, 144 430 dollars des États-Unis). Le Kenya a également bénéficié de l’assistance préparatoire du Fonds du patrimoine culturel immatériel pour l’élaboration de deux candidatures pour la Liste de sauvegarde urgente : « Les traditions et pratiques associées aux Kayas » (dossier n 00285, 2008-2009, 6 000 dollars des États-Unis) (élément inscrit sur la Liste de sauvegarde urgente en 2009), et « Rituels et pratiques associés au sanctuaire de Kit Mikayi chez les communautés luo au Kenya » (dossier n 00632, 2013-2015, 17 668 dollars des États-Unis), (élément inscrit sur la Liste de sauvegarde urgente en 2019). Les travaux prévus par les contrats relatifs à ces projets ont été exécutés conformément aux règlements de l’UNESCO.
Paragraphe 10(a) : Le projet est d’envergure locale et doit être mis en œuvre par des partenaires nationaux et locaux.
Paragraphe 10(b) : La demande n’explique pas comment le projet pourrait encourager de nouvelles contributions pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel et pour assurer sa viabilité.
- Décide de renvoyer à l’État demandeur la demande d’assistance internationale pour le projet intitulé Sauvegarde et promotion des traditions menacées des tribus minoritaires du nord du Kenya : une initiative de l’État partie sur les systèmes de savoir autochtones du peuple El-Molo du lac Turkana et invite l’État à soumettre une demande révisée au Bureau pour examen lors d’une prochaine session ;
- Encourage l’État partie, s’il souhaite resoumettre sa demande, à réviser le contenu du projet en tenant compte des préoccupations soulevées ci-dessus et à veiller, en particulier, à faire correspondre clairement les objectifs généraux et les activités, le budget et le calendrier proposés pour le projet.