Décision du Comité intergouvernemental : 17.COM 7.b.38

Le Comité

  1. Prend note que l’Algérie a proposé la candidature du raï, chant populaire d’Algérie (n  01894) pour inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

Le raï est une chanson populaire d’Algérie. Moyen de véhiculer la réalité sociale sans tabou ni censure, le raï aborde des thèmes tels que l’amour, la liberté, le désespoir et les pressions sociales. Il était à l’origine pratiqué en milieu rural par des doyens qui chantaient des textes poétiques en arabe vernaculaire, accompagnés d’un orchestre traditionnel. Au début du vingtième siècle, les prima donnas y ajoutent des idées transgressives, en chantant la liberté d’aimer et de désirer, tout en glorifiant dieu et les saints. Au fil du temps, le raï s’est progressivement imposé, d’abord au niveau national lors des rituels et des mariages, puis au niveau mondial grâce à des artistes tels que Khaled et Mami, déplaçant les spectacles des espaces clos vers les événements culturels, les célébrations et les fêtes nationales et religieuses. Son message de liberté et de transgression est devenu universel, porté par des jeunes femmes et des jeunes hommes qui chantent et dansent pour la jeunesse de leur pays et du reste du monde. La musique raï est ainsi considérée comme un genre pour les jeunes, représentant un canal d’expression de leurs sentiments dans leur quête de libération des contraintes sociales. Les musiciens fabriquent et décorent leurs propres instruments et la transmission se fait de manière informelle, par observation, ou formelle, par apprentissage.

  1. Considère que, d’après les informations contenues dans le dossier, la candidature satisfait aux critères suivants pour une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

R.1 : Le raï est une forme de musique folklorique qui est pratiquée lors des fêtes rituelles et des mariages dans toute l’Algérie. Les détenteurs sont des doyens, des prima donnas (« cheikhat »), de jeunes chanteurs, des paroliers, des poètes, des musiciens, des compositeurs, des arrangeurs, des éditeurs et des producteurs et fabricants d’instruments traditionnels. Les rôles des détenteurs sont expliqués dans le dossier. Les savoirs et savoir-faire de l’élément sont transmis via l’observation ou entre maîtres et apprentis. Le raï est profondément ancré dans la culture des populations rurales et nomades et favorise une atmosphère conviviale et sociable lors des festivités familiales et au sein des communautés. Cet élément est compatible avec les instruments internationaux existants en matière de droits humains, et avec les exigences de respect mutuel entre les communautés et de développement durable. Il s’agit d’un élément universellement accessible, sans restriction ni distinction de genre.

R.2 :  Au niveau local, l’inscription permettra de promouvoir les pratiques culturelles et sociales des villes et des lieux qui ont contribué à l’émergence du raï, tout en renforçant le sentiment d’appartenance des populations et en mettant en valeur leur mode de vie et leurs coutumes. Au niveau national, l’inscription contribuera à la reconnaissance de la dimension esthétique et artistique du raï et du patrimoine culturel immatériel en général. Au niveau international, le dossier explique que l’inscription permettra une plus grande sensibilisation à l’élément et qu’elle favorisera une meilleure appréciation de l’importance du patrimoine culturel immatériel et de la diversité culturelle mondiale.

R.4 : Le dossier de candidature a été préparé par une équipe de chercheurs du Centre National de Recherches Préhistoriques, Anthropologiques et Historiques. Les enquêtes de terrain ont été menées avec la participation active des acteurs locaux, des associations culturelles et des directions de la culture des différentes provinces. Plusieurs réunions, événements et entretiens ont été organisés avec les chanteurs de raï au cours du processus de candidature. Le dossier comprend une série de lettres indiquant le consentement libre, préalable et éclairé de scientifiques, de professeurs d’université, d’écrivains, de musiciens et de musicologues.

R.5 : L’élément est inclus dans la Banque Nationale de Données du Patrimoine Culturel Immatériel de l’Algérie. L’inventaire est maintenu par le Centre National de Recherches Préhistoriques, Anthropologiques et Historiques. Cet élément a été inclus pour la première fois dans l’inventaire en janvier 2015 et mis à jour en 2019 et 2021. Le processus d’inventaire a été mené par des chercheurs qui ont mené des études sur le terrain pour collecter des informations. Les détenteurs et les praticiens travaillent en collaboration avec les chercheurs pour identifier et définir l’élément. Les mises à jour de l’inventaire sont effectuées tous les ans ou tous les deux ans.

  1. Considère en outre que, sur la base des informations fournies dans le dossier et celles fournies par l’État partie au Comité via le processus de dialogue, le critère suivant pour une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité est satisfait.

R.3 : Le dossier explique que les efforts de sauvegarde passés et actuels ont été menés par diverses associations culturelles, qui ont participé activement aux manifestations culturelles et musicales aux niveaux local, national et international, telles que le festival du raï, le mois du patrimoine, les semaines culturelles, la journée des artistes, les festivités nationales et religieuses, ainsi que les manifestations mondiales. L’État partie sauvegarde l’élément à travers la création du festival national du raï à Oran, la protection du raï par des instruments juridiques, le soutien aux efforts de documentation, etc. Les mesures de sauvegarde proposées comprennent l’organisation de festivals avec l’implication des sociétés civiles, l’animation d’ateliers de transmission et de partage des savoir-faire liés au raï, l’organisation d’un colloque scientifique sur le raï, etc. Les groupes de travail sur le raï ont réuni et impliqué les communautés dans diverses réunions afin de planifier les différentes mesures de sauvegarde. Par ailleurs, les communautés ont proposé de se structurer en plusieurs associations afin de participer à la mise en œuvre des mesures de sauvegarde.

  1. Décide d’inscrire le raï, chant populaire d’Algérie sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité ;
  2. Félicite l’État partie pour la soumission de ce dossier amélioré à la suite de la décision du Comité de renvoyer la version précédente du dossier en 2020.

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