Décision du Comité intergouvernemental : 17.COM 7.b.29

Le Comité

  1. Prend note que le Tadjikistan et la République islamique d’Iran ont proposé la candidature de la cérémonie du mehregân (n  01859) pour inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

La cérémonie du mehregân au Tadjikistan et en Iran est une célébration annuelle de l’action de grâces, à grande échelle, qui se déroule à l’automne. Les rituels exécutés lors de la cérémonie dépendent de la religion des praticiens. Par exemple, les communautés zoroastriennes récitent des extraits de leur livre sacré, tandis que les musulmans récitent des prières particulières. Les deux communautés dressent des tables remplies de mets locaux, organisent des expositions florales, préparent différents plats et offrent des noix, des confiseries et des boissons spéciales Les célébrations incluent de la musique, des chants, des danses, des spectacles de théâtre et des épreuves sportives, notamment de lutte. Le lieu de célébration varie. Elles ont parfois lieu en plein air près des sanctuaires que de nombreux participants visitent pour rendre grâce après une récolte abondante. En parallèle, il arrive que les habitants offrent et exposent des produits artisanaux et industriels liés à l’agriculture. Parce qu’elle réunit les participants indépendamment de leur âge, de leur origine ethnique et de leur religion, la cérémonie du mehregân favorise la cohésion sociale, la solidarité et l’inclusion. Les jeunes acquièrent les connaissances et savoir-faire liés à la cérémonie en participant aux préparatifs et aux événements eux-mêmes, mais aussi dans les écoles et par l’intermédiaire des médias publics et des réseaux sociaux.

  1. Considère que, d’après les informations contenues dans le dossier, la candidature satisfait aux critères suivants pour une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

R.1 :  La cérémonie du mehregân permet de rendre grâce pour les produits de l’agriculture et de l’élevage. Elle comprend des célébrations à grande échelle au Tadjikistan et en Iran, du 2 octobre au 2 novembre, chaque année. Les détenteurs et les praticiens de l’élément sont les populations de ces deux pays. En Iran, les détenteurs et praticiens comptent également les communautés zoroastriennes rurales, y compris les enfants et les adolescents, ainsi que les communautés musulmanes rurales. Les femmes participent à l’élément en préparant des plats traditionnels. Au Tadjikistan, les détenteurs et praticiens comprennent des agriculteurs, des jardiniers, des éleveurs et des artisans. Dans les deux Etats, l’élément se transmet grâce à des méthodes informelles et intergénérationnelles. Ces efforts englobent les jeunes générations qui participent au festival ou apprennent grâce à l’éducation (par exemple, dans le cadre de programmes pour l’éducation élémentaire et l’éducation supérieure). Dans les deux pays, des émissions et des programmes télévisés sont diffusés afin de sensibiliser à l’élément. En Iran, l’élément renforce les liens d’amitié, soutient la participation sociale de tous, y compris des femmes, et permet d’organiser des activités humanitaires, comme le fait de nourrir les pauvres et d’aider les populations à faible revenu de la société. Au Tadjikistan, l’élément renforce la cohésion sociale, l’amitié et l’identité nationale.

R.5 : L’élément est inscrit à l’Inventaire représentatif national iranien du patrimoine culturel immatériel et à l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel du Tadjikistan. En Iran, l’inscription de l’élément à l’inventaire vient d’un effort commun des communautés locales et des ONG actives dans les provinces de Gilan, Mazandaran, Yazd, Kerman et Fars. La préparation et la mise à jour de l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel du Tadjikistan ont été rendues possibles grâce à des activités organisées sur le terrain, telles que des réunions pour les communautés, groupes et individus locaux, ainsi que grâce à une étroite collaboration avec des ONG locales et des organisations publiques. En Iran, l’Inventaire est mis à jour tous les trois ans. L’Inventaire du Tadjikistan a lui été créé en 2013 et mis à jour en 2016 et 2018. Même si le dossier contient peu d’informations sur le processus de mise à jour de l’Inventaire national du Tadjikistan et sur la participation de la communauté, les informations données satisfont au critère R.5.

  1. Considère en outre que les informations contenues dans le dossier ne sont pas suffisantes pour permettre au Comité de déterminer si les critères suivants pour une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité sont satisfaits :

R.2 : L’inscription permettrait de promouvoir le dialogue et les échanges entre les différentes croyances et religions, et donc de contribuer à la paix et l’amitié à l’échelle internationale. Elle sensibiliserait aux célébrations automnales à l’échelle internationale. De plus, l’inscription permettrait de favoriser le dialogue entre les communautés locales de praticiens, mais aussi dans d’autres régions d’Iran, et renforcerait les liens entre les praticiens de l’élément au Tadjikistan. Cependant, le dossier de candidature n’explique pas suffisamment la manière dont l’inscription permettrait de promouvoir le patrimoine culturel immatériel en général aux niveaux local, national et international. Au lieu de cela, le dossier aborde uniquement l’augmentation de la visibilité et la prise de conscience de l’importance de l’élément lui-même.

R.3 :  Le dossier de candidature fournit des informations sur les efforts passés et en cours des communautés, efforts entrepris dans différents domaines : documentation audiovisuelle, formation sur les traditions associées à la cérémonie, transmission des connaissances relatives à la confection des vêtements et à l’agriculture et organisation d’événements culturels et de festivals. Les deux États soumissionnaires ont soutenu les mesures de sauvegarde en allouant des budgets chaque année, en préparant des documentaires afin de sensibiliser à l’élément, en inscrivant l’élément à leurs Inventaires et en promouvant la cérémonie. Cependant, le dossier ne fournit pas assez d’informations pour déterminer si le critère R.3 est satisfait car chaque État soumissionnaire a présenté ses propres mesures de sauvegarde, et le dossier ne contient aucune mesure de sauvegarde commune. Les États soumissionnaires ont fourni une liste d’organisations et d’instituts, cependant, le dossier manque de plus amples informations sur la manière dont les communautés, groupes et individus ont pris part à la planification des mesures de sauvegarde proposées, et sur la manière dont ils prendront part à leur mise en œuvre.

R.4 : Le dossier explique qu’en Iran les communautés locales issues de plusieurs provinces ont participé à l’élaboration du dossier de candidature international. Un groupe de travail a été établi au sein du Ministère de la Culture du Tadjikistan, constitué des représentants des différentes communautés, dont des chercheurs, des artisans traditionnels, des acteurs d’ONG, des travailleurs agricoles et des fonctionnaires culturels. Le dossier mentionne brièvement l’implication des ONG, des communautés et des parties prenantes. Cependant, il ne donne pas assez de détails concernant le rôle de ces communautés, groupes et individus et leurs contributions au processus de candidature. De plus, la majorité des lettres de consentement venant du Tadjikistan ont été soumises par des travailleurs ou des membres de départements et d’organisations gouvernementaux, et n’indiquaient pas de quelle manière ces organisations représentent les communautés concernées. Étant donné que l’élément est largement pratiqué par les populations des deux Etats soumissionnaires, les informations fournies dans le dossier ne permettent pas de prouver la participation la plus large possible des communautés au processus de candidature.

  1. Décide de renvoyer la candidature de la cérémonie du mehregân aux États parties soumissionnaires et les invite à resoumettre la candidature au Comité pour examen au cours d’un cycle ultérieur ;
  2. Rappelle aux États parties l’importance de garantir la participation la plus large possible des communautés concernées lors de l’élaboration et de la mise en œuvre des mesures de sauvegarde, et de l’inventaire ;
  3. Rappelle en outre aux États parties qu’ils doivent garantir le consentement libre, préalable et informé des communautés concernées par l’élément.

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