Décision du Comité intergouvernemental : 13.COM 10.b.38

Le Comité

  1. Prend note que la Tunisie a proposé la candidature des savoir-faire liés à la poterie des femmes de Sejnane (n  01406) pour inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

Les savoir-faire liés à la poterie des femmes de Sejnane ont trait à la pratique consistant à utiliser une technique particulière pour produire des artefacts en terre cuite pour la maison, notamment des ustensiles de cuisine, des poupées et des figurines animalières inspirées par l’environnement. Toutes les étapes de la production sont accomplies par des femmes, qui vendent également les poteries dans le village et sur le bord des routes avoisinantes ; les femmes occupent donc une place importante dans la communauté. L’argile est généralement extraite dans les lits d’oueds, puis elle est débitée en mottes, concassée, purifiée et détrempée avant d’être pétrie et façonnée. Une fois cuites, les poteries sont décorées de motifs géométriques bicolores rappelant les tatouages traditionnels et les tissages berbères. Les hommes participent à la vente, ce qui fait de cet artisanat familial un outil de promotion de la cohésion familiale. Confrontées aux évolutions socioéconomiques, les femmes de Sejnane ont adapté leur artisanat aux nouvelles exigences de la vie moderne et aux aléas de la demande, révélant ainsi leur capacité d’innovation. Les connaissances et savoir-faire relatifs à cet artisanat de la poterie manuelle à Sejnane sont transmis dans le cadre d’un enseignement traditionnel et informel au sein des communautés où les jeunes filles sont encouragées à apprendre cet art du feu en plus de leur scolarité. L’Office national de l’artisanat dispense également des cours de formation pour les jeunes femmes de la communauté qui souhaitent se consacrer à cette activité.

  1. Décide que, d’après l’information contenue dans le dossier, la candidature satisfait aux critères d’inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité comme suit :

R.1 :  Le dossier de candidature décrit clairement la nature et les spécificités du savoir-faire artisanal ainsi que les processus technologiques qui y sont associés. La poterie de Sejnane est une tradition vivante profondément ancrée dans la vie de la communauté et perçue comme un élément de l’identité locale. L’élément renforce les relations sociales au sein des familles et de la société de manière plus large à travers des principes de coopération et solidarité. La production de poterie remplit toujours sa fonction d’origine, c’est-à-dire qu’elle fournit la vaisselle domestique ou sert de source de revenus. Cet aspect économique contribue à la viabilité de l’élément ainsi qu’à la préservation de sa fonction originale.

R.2 :  L’inscription de l’élément permettrait de souligner le lien étroit existant entre le développement durable et l’identité culturelle, la dimension socioéconomique d’éléments similaires du patrimoine culturel immatériel et le rôle essentiel que jouent les savoir-faire traditionnels dans le développement local. L’histoire de l’élément remonte au néolithique et sa forme actuelle est le résultat d’un processus complexe d’échanges culturels entre les territoires et les praticiens, ce qui témoigne de la créativité infinie déployée au fil du temps.

R.3 :  Les mesures de sauvegarde s’appuient sur l’excellente connaissance des forces et des faiblesses actuelles de l’élément. Les mesures proposées sont équilibrées et se concentrent sur des aspects clés, dont l’éducation et la transmission du savoir-faire par le biais de méthodes traditionnelles, novatrices ou plus formelles, la documentation et la recherche enrichies par la popularisation de l’élément, des mesures pratiques incluant la fourniture de matériels, la recherche de nouveaux canaux de commercialisation, ou l’adoption d’un label d’excellence visant à assurer une production de grande qualité. Les mesures de sauvegarde ont été conçues en tenant compte des besoins de l’élément et de ses praticiens. Elles n’interfèrent pas avec l’environnement social existant, mais s’attachent à travailler sur des faiblesses ou des aspects sous-développés en accord avec les besoins identifiés.

R.4 :  Le dossier a été préparé en coopération avec des associations représentatives, les autorités gouvernementales, des universités et des experts. La séquence des activités témoigne du caractère systématique du travail entrepris. Au cours du processus de candidature, diverses parties prenantes ont contribué à identifier les aspects clés de l’élément et à développer des mesures de sauvegarde pertinentes. Les praticiens ont activement participé à la collecte de la documentation requise ainsi qu’à la présentation des techniques au public. Les lettres de consentement des artisans locaux et d’autres parties prenantes offrent un témoignage clair de leur soutien à la candidature.

R.5 :  Suite à la documentation systématique sur plusieurs années des savoir-faire liés à la poterie des femmes de Sejnane, l’élément a été inclus dans l’inventaire national du patrimoine culturel immatériel de Tunisie en 2016, qui est géré par l’Institut national du patrimoine. L’ensemble des activités ayant conduit à cette inclusion sont décrites, tout comme les mécanismes de suivi et les principes généraux de l’inventaire.

  1. Inscrit les savoir-faire liés à la poterie des femmes de Sejnane sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité ;
  2. Félicite l’État partie pour sa première inscription ;
  3. Invite l’État partie à considérer le risque élevé de commercialisation excessive de l’élément, et l’encourage à se concentrer sur les aspects sociaux et culturels de l’élément lors de la planification et de la mise en place des mesures de sauvegarde ;
  4. Rappelle à l’État partie que la mise à jour est un aspect important du processus d’élaboration des inventaires et l’invite en outre à inclure des informations détaillées dans son prochain rapport périodique sur la mise en œuvre de la Convention au niveau national, sur la périodicité de la mise à jour de l’inventaire national du patrimoine culturel immatériel, conformément à l’article 12.1 de la Convention.

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