Les jeunes documentent et revitalisent les traditions alimentaires au Kenya

Quel était le besoin ? 

Les pratiques alimentaires traditionnelles au Kenya ont été fortement menacées par les pressions extérieures liées à l’évolution des modes de vie et des représentations qui ont conduit à l’adoption d’aliments hautement commercialisés et moins nutritifs, en particulier chez les jeunes. Les aliments locaux étaient souvent considérés comme dépassés, ce qui leur a fait perdre leur popularité. Cette évolution a mis en péril la riche diversité des ressources alimentaires locales et le savoir autochtone transmis par les aînés. La transmission affaiblie de la culture alimentaire traditionnelle a eu des conséquences sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle, la biodiversité, la variété du régime alimentaire et la santé des communautés.

Quelles approches ont-elles été mises en oeuvre ?

Un projet pilote a été lancé pour identifier et documenter les traditions alimentaires avec les écoliers, afin d’encourager le respect de ces pratiques chez les jeunes. L’initiative a impliqué deux écoles primaires dans chaque communauté : Muraka et Shihuli à Isukha, et Chemolingot et Churo à Pokot. Les enseignants responsables de clubs scolaires, et les coordinateurs locaux ont d’abord été formés aux techniques d’inventaire basé sur la communauté, notamment aux entretiens et à la photographie. Ces enseignants ont ensuite formé des élèves âgés de 12 à 14 ans à la collecte d’informations et à la documentation des habitudes alimentaires de leurs communautés.

Les élèves ont interrogé leurs parents et leurs proches et ont photographié les aliments traditionnels, les méthodes de préparation et les pratiques culturelles. À Isukha, leur travail a mis l’accent sur les activités agricoles et les cultures, tandis qu’à Pokot, une communauté de pasteurs, la documentation s’est concentrée sur les activités d’élevage et les pratiques liées aux plantes et fruits sauvages. Le projet a exploré 22 thèmes, dont l’obtention, la préparation, le service et la consommation des aliments, ainsi que les rituels, les tabous, les mythes, les chansons et les croyances qui y sont liés.

Les inventaires ont été complétés par un livre de photos et une méthodologie offrant des conseils étape par étape pour l’inventaire des traditions alimentaires. Le guide (voir lien ci-dessous) couvre des aspects tels que les types d’aliments traditionnels, les cycles saisonniers, les méthodes de récolte et de préparation, les méthodes de conservation, les valeurs nutritionnelles et les rituels associés. Chaque communauté a également organisé un événement dédié à l’alimentation pour sensibiliser le public et présenter ses traditions alimentaires locales à la communauté.

Cette initiative, intitulée « La réussite de la promotion des aliments traditionnels et de la sauvegarde des modes d’alimentation traditionnels au Kenya », a été sélectionnée pour figurer dans le Registre de bonnes pratiques de sauvegarde en 2021.

Comment cela a-t-il fonctionné?

Les attitudes et les comportements du public à l’égard des aliments traditionnels ont évolué positivement, avec une meilleure appréciation et transmission des pratiques alimentaires traditionnelles et une prise de conscience des menaces qui pèsent sur la diversité des modes alimentaires traditionnels et sur les connaissances de la nature qui y sont liées. Auparavant méprisés, les aliments traditionnels ont été célébrés comme un signe de fierté culturelle et de bonne santé. La méthodologie innovante consistant à impliquer les jeunes dans la documentation des traditions alimentaires a également favorisé l’échange de connaissances entre les générations.

En outre, les aliments traditionnels ont suscité un regain d’intérêt dans les domaines de la recherche et de la formation. Le nombre d’étudiants souhaitant mener des recherches sur les aliments et les semences locaux a augmenté et les universités ont commencé à proposer des cours intégrant des thèmes liés à l’alimentation et à l’agriculture traditionnelles.

Enfin, le manuel d’inventaire des modes d’alimentation traditionnels a fourni un modèle qui a été partagé et répliqué à plus large échelle par d’autres institutions au niveau régional au Kenya, ainsi qu’au niveau international en Éthiopie et au Burkina Faso. Cela a démontré l’extensibilité et l’impact de cette approche pour sauvegarder les modes d’alimentation traditionnels, ainsi que sa capacité à répondre aux préoccupations en matière de sécurité et de diversification alimentaires.

Comment la communauté a-t-elle été impliquée ?

Les communautés concernées ont été impliquées dans toutes les étapes du projet, grâce aux activités d’inventaire menées par les étudiants. Les résultats des inventaires, y compris le livre de photos, ont été partagés avec les communautés lors de la publication, ainsi qu’au cours des événements connexes dédiés à l’alimentation. Les étudiants ont souvent interrogé leurs proches, leurs aînés et leurs parents, développant ainsi un sentiment de fierté, d’appartenance et de cohésion dans le processus. Le consentement libre, préalable et éclairé a été obtenu des différentes communautés dans les langues locales.

• Livre ‘Safeguarding Intangible Cultural Heritage: a Practical Guide to Documenting Traditional Foodways’

Autres liens

• La réussite de la promotion des aliments traditionnels et de la sauvegarde des modes d’alimentation traditionnels au Kenya
• Safeguarding Intangible Cultural Heritage: a photobook of traditional foodways of the Isukha and East Pokot communities of Kenya