Décision du Comité intergouvernemental : 11.COM 10.c.4

Le Comité

  1. Prend note que la Croatie a proposé l’écomusée de la Batana, projet communautaire de sauvegarde de la culture vivante de Rovinj/Rovign (no 01098) pour sélection et promotion par le Comité en tant que programme, projet ou activité reflétant le mieux les principes et les objectifs de la Convention :

La batana est un type de bateau de pêche traditionnel de la ville de Rovinj, en Croatie. Importante pour l’activité et le patrimoine de la ville, la batana, dont les méthodes de fabrication se transmettaient dans les familles, a progressivement disparu avec l’arrivée de modèles industriels jusqu’en 2004, où des passionnés locaux ont créé une association afin de sauvegarder ce bateau et les pratiques associées (un dialecte local et des chants traditionnels). La Maison de la Batana, une association à but non lucratif, appuyée par la municipalité, le Musée du patrimoine de la ville de Rovinj, le Centre de recherches historiques de Rovinj, la communauté italienne de Rovinj ainsi qu’une spécialiste de l’écomuséologie, a créé l’Écomusée de la Batana afin de faire connaître ce bateau au public et de proposer des formations sur les pratiques qui lui sont associées. Il abrite une exposition permanente qui montre la fabrication de la batana et des équipements de pêche ainsi que la variété des activités de pêche qui sont pratiquées ; il organise des ateliers sur la construction du bateau, notamment pour les constructeurs de bateaux ; il publie des documents spécialisés ; il organise des régates et encourage les jeunes à y participer ; il dispose d’un chantier naval pour construire et réparer les bateaux, sur lesquels des visites guidées ont également lieu aujourd’hui ; et il coopère au niveau national et international en participant à des festivals, des régates et des tables rondes afin de souligner le rôle de la batana dans les communautés traditionnelles de marins et de contribuer à sauvegarder le patrimoine maritime.

  1. Décide que, d’après les informations contenues dans le dossier, le programme répond comme suit aux critères énoncés au paragraphe 7 des Directives opérationnelles concernant la sélection au titre de meilleure pratique de sauvegarde :

P.1 :  Le dossier décrit bien l’initiative proposée, l’Écomusée de la Batana, dont l’objectif est d’étudier, de préserver et d’évaluer les souvenirs et la vie quotidienne indissociables de ce bateau. Le dossier explique la situation qui a conduit au lancement de ce projet (comme les changements récents intervenus dans la vie de la communauté : l’urbanisation et l’arrivée de nouveaux habitants, le tourisme et l’utilisation de plastique dans la construction des bateaux). Il décrit la mise en œuvre du projet et liste les actions de sauvegarde : documentation, continuité de la tradition, promotion, éducation, recherche et transmission, dictionnaire du dialecte italien local, préservation d’un petit chantier naval, régates, parcours sur le front de mer et formation des constructeurs de bateaux. Les communautés participantes sont décrites comme étant à l’origine du projet et comme les détentrices de ce patrimoine culturel immatériel spécifique. Un seul élément local a permis de revitaliser tout l’espace culturel, englobant des traditions culturelles immatérielles et matérielles apparentées, et d’améliorer le bien-être des communautés.

P.2 :  Bien que ce projet soit au départ d’envergure locale et nationale, le dossier indique que l’Écomusée de la Batana entend faire connaître le rôle que joue ce bateau en tant que lien avec la grande famille des embarcations traditionnelles et des communautés locales associées de l’Adriatique et de la Méditerranée, et en tant que vecteur d’un dialogue interculturel. Le projet contribue donc activement à des initiatives internationales visant à protéger le patrimoine maritime (coopération avec d’autres musées, concours internationaux et organisation de réunions nationales et internationales dédiées à la documentation et à la sauvegarde du patrimoine en question).

P.3 :  Le dossier démontre que le musée reflète les principes de la Convention : grande participation de la communauté à la sauvegarde de ses traditions vivantes ; rôle de ce patrimoine dans son développement ; sensibilisation, aux niveaux local, national et international, à l’importance du patrimoine culturel immatériel de la ville ; transmission et programmes éducatifs ; implication en matière d’inventaires ; participation de spécialistes ; et recherches universitaires sur différents aspects de l’élément. L’écomusée offre donc un bon exemple d’auto-gestion efficace basée sur de nouveaux concepts de muséologie et de valorisation du patrimoine culturel immatériel de la communauté locale.

P.4 :  Le dossier affirme que l’écomusée a été efficace à plusieurs points de vue : construction et utilisation de nouveaux bateaux (de façon traditionnelle mais aussi nouvelle : pêche, excursions et régates/sport) ; renouveau de traditions et de savoir-faire complémentaires (traditions orales et dialecte) ; inscription sur l’inventaire national ; nouvelles sources de motivation pour les jeunes (régates internationales et nouvelles méthodes d’apprentissage). Le programme a donc contribué à la viabilité du patrimoine culturel en général ainsi qu’à celle de l’élément lui-même. Un grand nombre de personnes a participé au projet et les jeunes se sont associés à l’élément ainsi qu’à leur patrimoine au sens large, en en assurant par là-même la continuité. L’État soumissionnaire a clairement démontré que le patrimoine culturel immatériel menacé de la tradition des bateaux batana a été efficacement et durablement revitalisé.

P.5 :  Le dossier indique clairement que le projet a été initié et mis en œuvre par la communauté concernée. Des représentants de la communauté font partie de l’équipe de direction du musée et en organisent toutes les activités (ateliers, programmes éducatifs et régates). La communauté locale et les membres de l’écomusée ont préparé tous les documents de la candidature, avec l’aide du Musée ethnographique de l’Istrie et du Ministère de la culture. Les lettres de consentement des communautés concernées sont jointes.

P.6 :  Le dossier propose un modèle qui s’appuie sur : une initiative ascendante à laquelle participe l’ensemble de la communauté ; l’inclusion de différents aspects des traditions vivantes afin de renouer avec le patrimoine d’une communauté locale ; l’engagement de professionnels ; des implications positives pour le mode de vie actuel / les activités quotidiennes de la communauté ; et la création de réseaux locaux, nationaux et internationaux. En outre, un écomusée constitue un modèle organisationnel adapté, et l’établissement de vastes réseaux est essentiel pour assurer la viabilité du projet et maintenir un dialogue interculturel.

P.7 :  L’Écomusée de la Batana partage déjà son expérience à l’échelle nationale et internationale, à travers des réunions (conférences, tables rondes), des manifestations (régates, compétitions) et des visites informelles. Son site Internet permet d’accéder librement aux informations le concernant. Les détenteurs du patrimoine culturel immatériel de Rovinj, les représentants de la communauté locale et les autorités ont manifesté leur volonté de continuer à partager leur expérience avec d’autres personnes (des lettres signées en attestent). L’écomusée a fait part de son souhait de nouer des relations à long terme avec d’autres communautés du monde afin de favoriser le dialogue interculturel. Cette étude de cas peut constituer une source d’inspiration pour des projets similaires dans d’autres lieux.

P.8 :  La proposition présente des exemples concrets d’évaluations qui sont réalisées. Les activités de sauvegarde de l’écomusée sont évaluées chaque année par la communauté locale et les activités qui bénéficient d’un financement externe sont évaluées par le Ministère de la culture et d’autres institutions. Le musée a remporté plusieurs prix locaux et internationaux, ce qui constitue un autre outil d’évaluation. Étant donné que certains des éléments du patrimoine culturel immatériel gérés par le musée sont inscrits au Registre national des biens culturels, ils sont également contrôlés par le ministère de la Culture.

P.9 :  Le dossier suggère que la plupart des étapes et modèles proposés peuvent également s’appliquer aux pays en développement (démarche ascendante, inclusion et éducation formelle et non formelle pour susciter l’intérêt des jeunes envers leur patrimoine). Le modèle organisationnel d’un écomusée peut également être applicable, bien que certains pays n’aient pas la législation nécessaire. Une approche interdisciplinaire pourrait donner naissance à de nouvelles idées et motiver la recherche de nouvelles formes de soutien et de financement. Les liens entretenus par l’écomusée avec des projets similaires ont joué un rôle important dans l’autonomisation de la communauté locale.

  1. Sélectionne l’écomusée de la Batana, projet communautaire de sauvegarde de la culture vivante de Rovinj/Rovign comme programme, projet ou activité reflétant le mieux les principes et les objectifs de la Convention et félicite l’État soumissionnaire d’avoir souligné le lien effectif entre la revitalisation d’un élément du patrimoine culturel immatériel et le développement durable, avec un impact sur l’ensemble d’une communauté.

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