Décision du Comité intergouvernemental : 13.COM 10.b.4

Le Comité

  1. Prend note que les Bahamas ont proposé la candidature de la vannerie artisanale aux Bahamas (n  01401) pour inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

La vannerie artisanale aux Bahamas, que l’on trouve dans tout l’archipel des Bahamas, concerne la production et le tissage manuels de tresses de paille par les autochtones en utilisant les méthodes traditionnelles de tressage et de tissage transmises il y a plusieurs siècles dans la droite ligne de l’héritage africain du pays. Les matières premières proviennent des palmiers et du sisal, qui poussent naturellement dans certaines zones forestières, et d’autres espèces végétales. Les artisans préparent les matières premières en plein air selon des méthodes traditionnelles, avant de créer de longues bandes de tresse à partir des fibres séchées qui sont ensuite cousues pour confectionner des objets fonctionnels, décoratifs et artistiques, ainsi que des souvenirs, vendus à la population locale et aux visiteurs. Les hommes et les femmes participent à cette pratique et à la vente des produits. La vannerie artisanale aux Bahamas est reconnue comme une composante dynamique de l’esprit ingénieux et résistant des Bahamiens et a joué un rôle essentiel dans l’économie des îles. L’artisanat de la vannerie est respectueux de l’environnement car les matières premières poussent librement dans la nature et les produits sont principalement confectionnés à la main. Diverses associations artisanales ont été créées et le Marché artisanal bahamien offre aux praticiens l’opportunité de vendre leurs produits en ville aux visiteurs.

  1. Décide que l’information contenue dans le dossier n’est pas suffisante pour permettre au Comité de déterminer si les critères d’inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité suivants sont satisfaits :

R.1 :  Au lieu d’expliquer l’importance culturelle de la pratique, le dossier met en évidence sa dimension économique et son rôle comme produit d’une industrie créative. Il y a également des informations contradictoires sur sa viabilité et sa transmission. D’une part, la vannerie est présentée comme une tradition vivante, avec de nombreux praticiens, tandis que d’autre part, de sérieuses inquiétudes sont soulevées quant à la continuité de sa transmission du fait d’un manque d’intérêt.

R.2 :  Le dossier affirme que l’inscription de l’élément légitimerait « la propriété locale et augmenterait la fierté suscitée par l’élément en tant que symbole d’une identité bahamienne unique », ce qui pourrait être considéré comment étant contraire aux exigences de respect mutuel entre les communautés (article 2.1 de la Convention) et de l’objectif de la Liste représentative d’encourager le dialogue dans le respect de la diversité culturelle (article 16 de la Convention). Le dossier se concentre également sur la promotion de la pratique en tant que marque principale du pays et source de fierté, plutôt que d’expliquer comment l’inscription pourrait augmenter la visibilité du patrimoine vivant en général, encourager le dialogue entre les communautés et promouvoir le respect de la diversité culturelle et de la créativité.

R.3 :  S’il contient certaines mesures de sauvegarde importantes qui visent à garantir le développement durable de l’élément, le plan de sauvegarde ne reflète pas la situation instable de l’artisanat en ce qui concerne sa signification culturelle et sociale, et sa transmission aux générations futures. Il semble au contraire promouvoir l’élément en tant qu’activité économique qui implique la production et la commercialisation de produits issus de l’artisanat. Les responsabilités de la mise en place des mesures de sauvegarde ne sont pas systématiquement réparties, et il manque un système de collaboration transparent. Les faiblesses de ce plan de sauvegarde pourraient, par exemple, affecter de façon négative la coordination entre les artisans qui sont éparpillés dans des endroits difficiles d’accès. Le dossier explique le rôle représentatif tenu par Creative Nassau, mais ne démontre pas que les praticiens ont participé à la préparation du plan de sauvegarde, ni comment ceux-ci seront impliqués dans sa mise en œuvre.

R.4 :  Le dossier n’explique pas si, et comment les praticiens et les communautés locales ont pris part au processus de candidature. Il traite cependant des limites de la participation de la communauté causées par l’importante fragmentation géographique du pays, et décrit des partenariats et projets en cours et en prévision. L’implication d’un nombre accru de parties prenantes concernées est davantage présentée comme l’un des résultats attendus de l’inscription, plutôt que comme une étape de la préparation de la candidature. Le nombre de consentements fournis n’est pas représentatif de la taille ni des caractéristiques de la communauté concernée. Tandis que l’État partie indique l’absence de pratique coutumière en matière d’accès à cet élément, il propose la mise en place de droits d’auteurs et de lois sur les brevets, ce qui ne relève pas de la portée de la Convention.

  1. Décide en outre que, d’après l’information contenue dans le dossier, la candidature ne satisfait pas au critère d’inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité suivant :

R.5 :  L’État partie a manifesté son intérêt pour la sauvegarde de la vannerie artisanale en tant qu’élément important du patrimoine culturel immatériel en vertu de la loi du marché de la vannerie artisanale de 2011, comme en témoigne le mémorandum d’accord entre le Ministère de l’environnement et du logement et Creative Nassau, et la documentation relative au projet du Programme des Nations Unies pour l’Environnement. D’après la documentation fournie, l’État partie ne gère pas d’inventaire conforme aux articles 11 et 12 de la Convention.

  1. Décide de ne pas inscrire la vannerie artisanale aux Bahamas sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité ;
  2. Souligne que la Convention ne vise pas à établir un système de propriété notamment par le biais d’indications géographiques ou de la propriété intellectuelle ;
  3. Invite l’État partie, lorsqu’il fait référence au patrimoine culturel immatériel, à éviter l’usage d’un vocabulaire et de concepts inappropriés, tels que « singularité » et « authenticité », qui vont à l’encontre de la nature vivante et dynamique du patrimoine culturel immatériel tel que défini par l’article 2.1 de la Convention ;
  4. Invite en outre l’État partie à prendre en considération l’approche basée sur les communautés et sur la transmission du patrimoine culturel immatériel, telle que définie dans la Convention, plutôt que de privilégier la dimension économique des industries créatives, qui sont mieux traitées dans d’autres programmes de l’UNESCO dans le domaine de la culture.

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