Ayant ratifié la Convention de 2003 en 2004, ce rapport est le deuxième soumis par Maurice sur sa mise en œuvre au niveau national. La loi de 2003 sur le Fonds national du patrimoine (NHF) a été révisée et elle est à présent conforme à la Convention de 2003. La politique Creative Mauritius - vision 2025 reconnaît le potentiel du patrimoine culturel immatériel dans le secteur culturel. Le Fonds national du patrimoine, qui dépend du Ministère des arts et de la culture, est l’organe compétent pour la coordination des actions de mise en œuvre de la sauvegarde du patrimoine culturel matériel et immatériel. Il travaille en étroite collaboration avec les communautés et les ONG ainsi que d’autres organes comme le Centre Nelson Mandela pour la culture africaine et les fonds-en-dépôt qui gèrent les biens du patrimoine mondial. Le NHF est engagé dans un processus de révision de son cadre juridique pour intégrer le patrimoine culturel dans le système juridique de Maurice. Les Centres culturels de chaque communauté soutenue financièrement par les MAC (Associations des Musées des Caraïbes), les syndicats de langues (la Creole Speaking Union), les organisations communautaires, l’Université de Maurice, la Société de gestion des droits de Maurice (MRMS) et la Commission pour les arts, la culture et d’autres sujets (CACO) de l’île de Rodrigues figurent parmi les autres organes mis en place en coopération avec les diverses communautés mauriciennes.
Depuis qu’il a ratifié la Convention, le gouvernement a créé et/ou renforcé les institutions de formation et a apporté son appui aux institutions communautaires qui offrent des formations sur des éléments spécifiques (les représentations de sega tipik et la fabrication de ravan). L’Université de Maurice propose des masters en gestion du patrimoine et un cours de licence sur le tourisme culturel et patrimonial, qui inclut la gestion du patrimoine culturel immatériel.
Concernant la documentation, les Archives nationales disposent d’un système numérisé de tous les documents relatifs au patrimoine culturel immatériel, notamment du matériel audiovisuel, et la Bibliothèque nationale conserve une vaste documentation sur ce patrimoine. Les centres culturels travaillent avec le Fonds national du patrimoine afin de documenter leur patrimoine culturel immatériel et ce travail est par la suite intégré à l’inventaire national. En outre, le Centre Nelson Mandela dispose d’une bibliothèque et d’un centre de recherches et de documentation. Sur l’île de Rodrigues, la CACO a créé un centre de documentation et d’archives au sein de la Bibliothèque nationale à Port Mathurin où les communautés peuvent accéder à l’information, tandis que l’Aapravasi Ghat Trust Fund (AGTF) mène une activité de documentation et dispose d’un riche fonds d’archives sur les pratiques, par exemple le geetgewai. Ces collections sont généralement ouvertes au public en libre-accès.
Le Fonds national a élaboré un inventaire national de ses éléments depuis 2013 en collaboration avec les communautés, les ONG, les institutions d’enseignement supérieur, le Centre Nelson Mandela, les centres culturels, les Speaking Unions et les institutions qui gèrent les deux propriétés du patrimoine mondial. Le NHF abrite un inventaire de 117 éléments du patrimoine culturel immatériel venus des différentes communautés de Maurice. D’autres inventaires complémentaires sont également élaborés et mis à jour par des institutions et des associations. L’Inventaire national est organisé selon des principes territoriaux (localisation sur les diverses îles) et selon les cinq domaines de la Convention de 2003, mais cette approche est en cours de révision. L’Inventaire national prend en compte la viabilité du patrimoine culturel immatériel et certains des éléments inscrits sont menacés et peuvent nécessiter une sauvegarde urgente. La mise à jour de l’inventaire est un processus continu soumis au contrôle du NHF. Les éléments inventoriés sont identifiés au cours d’ateliers et de sessions de travail avec les communautés, par des associations qui élaborent leurs propres inventaires et par des chercheurs de diverses institutions qui travaillent avec les communautés et recueillent des informations. Bien que le processus d’inventaire soit dirigé au départ par des universitaires, il est prévu que les communautés jouent par la suite un rôle de premier plan et elles reçoivent maintenant des orientations sur ce processus. Le consentement préalable, libre et éclairé des communautés concernées a été obtenu pour l’inclusion des éléments sur ces inventaires. Les ONG ont été impliquées dès le départ en tant que membres des communautés et d’entités individuelles.
Dans le cadre des mesures de sauvegarde, les MAC ont organisé des concerts, des ateliers et des concours de tous niveaux et soutenu les études scientifiques, techniques et artistiques sur la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel en partenariat avec les autres organes. Ces activités incluent l’organisation d’expositions, de concerts et d’autres activités de sensibilisation. Les festivals apportent une visibilité au patrimoine culturel immatériel et contribuent à la création de réseaux et de partenariats entre les artistes, les États parties et les organisations. La Société de gestion des droits de Maurice protège les droits de propriété intellectuelle des artistes. De nombreuses activités ont été et continuent d’être menées par les communautés, des institutions appuyées par l’État, des ONG, des groupes communautaires, des artistes individuels et d’autres organisations dans le cadre de l’accès au patrimoine culturel immatériel. Le Centre Nelson Mandela promeut les éléments associés à la culture africaine et aux systèmes de connaissances traditionnelles sur l’artisanat (avec les jeunes et des artistes dans la production de sculptures de bois). Maurice a juridiquement reconnu les lieux de mémoire associés au patrimoine culturel immatériel de ses multiples communautés et leur a accordé une protection. Les orges de gestion des deux biens du patrimoine mondial de Maurice (le paysage culturel du Morne et l’Aapravasi Ghat) sauvegardent également le patrimoine culturel immatériel qui leur est associé, en proposant des ateliers avec des artistes locaux, et en documentant la musique, la danse, les pratiques culinaires, les savoir-faire artisanaux, les jeux traditionnels, les récits et le patrimoine constitué par les costumes, par exemple. Sur l’île de Rodrigues, la CACO et la Commission pour le tourisme collaborent étroitement avec les communautés pour sauvegarder et promouvoir le patrimoine culturel immatériel par des festivals, des représentations et par la cuisine, l’art et les foires artisanales. La Société de radiodiffusion de Maurice et d’autres chaînes de télévision ont également mis en avant le patrimoine culturel immatériel.
L’Université de Maurice propose des programmes éducatifs au travers de l’élaboration de ses programmes, de son enseignement et du renforcement général des capacités des professionnels du patrimoine. Ils comprennent des diplômes de Bachelors (BA) et de master (MA) pour lesquels le patrimoine culturel immatériel a été identifié et intégré dans le programme d’enseignement. L’ensemble des huit diplômés de MA sont employés dans les institutions du patrimoine qui sauvegardent et promeuvent également le patrimoine culturel immatériel. L’Institut Mahatma Gandhi participe à l’enseignement sur le sujet et dirige un musée sur le folklore indien afin de sauvegarder le patrimoine culturel immatériel des personnes d’origine indienne. En outre, une grande partie de la transmission s’effectue au travers de pratiques non formelles entre mère et fille, père et fils et entre les personnes âgées et les jeunes. Des groupes d’artistes transmettent leur art par la pratique et les représentations publiques dans les centres communautaires, les hôtels, les réunions de famille, sur les plages, etc. La Bhojpuri Speaking Union (BSU), en concertation avec la communauté, a créé l’école Geet-Gawai qui a par la suite inspiré l’ouverture de treize autres écoles similaires dans tout le pays. À Rodrigues, de nombreux groupes sont apparus autour des centres communautaires qui promeuvent le patrimoine culturel immatériel par la musique, les pratiques culinaires et l’artisanat. Des individus forment également le public à leur élément, par un apprentissage non formel chez eux et gratuitement. En outre, des groupes ont mis en place des établissements de formation pour les jeunes tandis que la CACO travaille avec les plus âgés en dispensant une formation pour apprendre la fabrication de tambours et transmettre leur savoir aux jeunes.
Concernant la coopération bilatérale, sous-régionale, régionale et internationale, Maurice a conclu des accords de coopération culturelle avec les pays voisins (les Seychelles, Madagascar, le Mozambique et l’Inde) qui partagent des valeurs culturelles, des expériences historiques et un patrimoine culturel immatériel, comme la langue créole et la musique sega. Ensemble, ils ont élaboré plusieurs programmes afin d’échanger des informations sur la promotion et la sauvegarde de leur patrimoine culturel immatériel. Le Festival culturel international Kreol, qui se tient tous les ans, réunit notamment la sous-région de l’Océan indien et les îles Caraïbes. Les Seychelles et la Réunion (France) ont également créé des festivals régionaux auxquels participent les artistes de Maurice. Par l’intermédiaire de l’Artists Assistance Scheme (Plan d’aide aux artistes) Maurice apporte un financement aux artistes qui participent à des représentations ou des festivals. Un réseau étroit a été mis en place non seulement entre Maurice et d’autres États parties, mais aussi entre les artistes de la région et d’ailleurs. Maurice a signé un certain nombre d’accords en vue de programmes d’échanges culturels favorisant la liberté des échanges d’artistes avec les autres pays. Un réseau de professionnels et de communautés est apparu récemment, et il s’est réuni lors de conférences internationales organisées par l’université de Maurice, l’AGTF et Le Morne en 2011, 2014 et 2015 sur le travail engagé et l’esclavage. Maurice accueille la formation sur le projet « La route internationale de travail sous contrat » adopté par la Conférence générale de l’UNESCO, dans lequel sont impliqués des pays qui partagent cette histoire. Cela a été l’occasion de créer des réseaux entre les professionnels, les organismes gouvernementaux et le grand public.
Maurice compte deux éléments inscrits sur la Liste représentative : le sega mauricien traditionnel (inscrit en 2014 et inclus dans le rapport actuel) et le geetgawai, chants populaires en bhojpuri à Maurice (inscrit en 2016, et qui sera donc inclus dans le prochain rapport).