La Direction générale en charge du patrimoine culturel (DGPC) a la responsabilité globale d’élaborer des politiques dans le domaine du patrimoine culturel immatériel y compris de déclarer des éléments comme faisant partie du patrimoine national, d’administrer l’inventaire national et un base de données sur le patrimoine vivant, et de coordonner au niveau national l’ensemble des initiatives mises en place par diverses institutions actives dans le domaine du patrimoine culturel immatériel. La Division en charge du patrimoine mobilier, immobilier et immatériel est l’organe responsable de la mise en œuvre de la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel depuis 2012.
Suite à une étude des actes législatifs, des politiques et des stratégies de sauvegarde d’autres pays, et du travail accompli par les organisations internationales et régionales et les organisations non gouvernementales nationales pertinentes, les administrations culturelles, les universités et les musées, un nouveau cadre législatif a été établi en 2009-2010. Il associe les principes de la Loi du patrimoine culturel de 2001 à ceux de la Convention de 2003. Cela s’est concrétisé par un décret-loi et une ordonnance qui constituent le cadre juridique et définissent les principes fondamentaux et les exigences méthodologiques et scientifiques pour la sauvegarde et l’inventaire du patrimoine culturel immatériel.
S’agissant de la politique de sauvegarde, un accent tout particulier est mis sur une approche intégrée de la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel en lien avec le patrimoine matériel et l’environnement physique. Cette approche encourage la documentation conjointe des éléments du patrimoine culturel immatériel et des éléments matériels qui y sont associés, la gestion du patrimoine culturel immatériel associé aux objets et la protection juridique conjointe d’éléments matériels liés au patrimoine vivant. Le lien entre patrimoine matériel et immatériel a été établi dans plusieurs sites du patrimoine mondial, et des projets sont en cours pour inscrire, entre autres, les usages traditionnels des plantes de la forêt laurifère de Madère et la redécouverte des légendes et contes traditionnels dans la région viticole du Haut-Douro.
La DGPC propose des formations courtes de renforcement des capacités dans le domaine de la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, destinées principalement aux administrations locales et régionales, aux musées locaux et aux organisations non gouvernementales. Depuis 2013, la DGPC collabore avec l’Universidade Aberta (Université ouverte) pour proposer un cours en ligne, d’une durée d’un semestre, de renforcement des capacités dans le domaine de la documentation des éléments du patrimoine culturel immatériel, avec la participation des communautés, des groupes et des individus. La DGPC a également publié des normes d’inventaire et de sauvegarde, disponibles en ligne, qui peuvent être utilisées dans le cadre des programmes de formation pour le renforcement des capacités.
Aux cotés des universités et des centres de recherche, les musées, en particulier les musées ethnographiques, sont des institutions de documentation qui jouent un rôle essentiel. Les archives du Musée national d’ethnologie sont particulièrement riches de documentation sur le patrimoine culturel immatériel en lien avec le patrimoine mobilier. Le travail de documentation, entrepris avec une approche participative, constitue la base de l’évaluation de la faisabilité de toute stratégie ou mesure de sauvegarde. Un logiciel dédié a été développé à cette fin par les autorités nationales entre 2009 et 2011. La base de données Matriznet pour les musées portugais, qui rassemble la documentation de plusieurs institutions, est disponible en ligne. Les autres bases de données sont les Archives historiques tropicales de l’Institut de recherche scientifique et tropicale et la Bibliothèque numérique de l’Institut Camões pour la langue et la culture portugaises. Deux principes fondamentaux s’appliquent quant à l’accès à l’information, ce sont la liberté d’accès et la protection des droits de propriété intellectuelle des communautés qui sont détentrices des traditions, deux principes que l’on doit veiller à maintenir.
Plusieurs travaux de recherche ont été entrepris sur le patrimoine culturel immatériel sous forme de projets proposés par des universités et des administrations publiques ou de thèses de doctorat (par ex. sur le rôle des musées et de l’inventaire). Certaines universités proposant désormais des cours sur le sujet, on s’attend à ce que la recherche dans ce domaine se développe dans les années à venir. La publication des travaux de recherche et l’organisation de plusieurs conférences nationales et internationales ont été soutenues par la DGPC. Une enquête sur « le patrimoine culturel immatériel portugais », réalisée par la DGPC en collaboration avec 494 institutions (musées, directions régionales de la culture, municipalités et centres de recherche), a servi de base à l’Inventaire national. Son site web diffuse les informations sur la recherche et la documentation.
Il y a deux inventaires que l’on peut décrire ainsi : (1) l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel, dressé en 2011, est, d’un point de vue légal, le principal instrument pour la sauvegarde nationale du patrimoine culturel immatériel, la sensibilisation du public et l’incitation à la participation directe des praticiens, des organisations non gouvernementales et des institutions locales aux processus d’identification, de documentation, de conception et de mise en œuvre des mesures de sauvegarde. Il est disponible en ligne depuis 2011 et permet de réaliser un inventaire entièrement numérisé. Il dispose d’une plateforme accessible au grand public, conçue par la DGPC, pour les pays lusophones. Dans l’Inventaire national, il y a deux types d’enregistrement possibles : (a) les inscriptions « à l’inventaire », dans le cadre du processus légal de sauvegarde, et (b) les inscriptions « de sauvegarde urgente » pour les éléments dont la viabilité est menacée. Les inscriptions ne doivent pas seulement décrire l’élément mais proposer également un plan ou des mesures de sauvegarde adaptés. En outre, la personne en charge de l’inscription est responsable de la mise en œuvre de ce plan ou de ces mesures. Les inscriptions aux deux inventaires doivent être mises à jour, dans le cadre d’un processus participatif, au moins tous les dix ans. L’Inventaire national n’est pas envisagé comme un outil de gestion destiné à l’administration du patrimoine mais plutôt comme un moyen permettant aux communautés, aux groupes et aux individus de sauvegarder et de gérer leurs éléments du patrimoine culturel immatériel. (2) L’Inventaire régional du patrimoine culturel immatériel des Açores est une version adaptée de l’Inventaire national et de son cadre juridique. Il a été adopté en 2012 par le gouvernement régional. Il est conçu comme un inventaire exclusif des éléments de l’archipel des Açores. Son concept, ses principes, sa méthodologie, son modèle d’entrée des données et son logiciel sont identiques à ceux de l’Inventaire national.
L’outil central de la sensibilisation est le site web de l’Inventaire national qui diffuse une grande variété d’informations relatives au patrimoine culturel immatériel auprès de divers publics. Des conférences et des séminaires ont été organisés par la Commission nationale auprès de l’UNESCO, la DGPC, les directions régionales, les universités, les centres de recherche et les organisations non gouvernementales accréditées. Un colloque sur les proverbes a, par exemple, été organisé par l’Association internationale de parémiologie en 2014.
En ce qui concerne les programmes éducatifs, les autorités nationales ont créé un « Kit pour la documentation du patrimoine immatériel » destiné au grand public et, plus particulièrement, aux jeunes. Il a été diffusé dans toutes les écoles et tous les musées ainsi que dans certaines associations et organisations non gouvernementales. Il peut être téléchargé gratuitement sur le site de l’Inventaire national. Le kit a été conçu pour être utilisé principalement dans les écoles et les services éducatifs des musées afin de sensibiliser ses utilisateurs au patrimoine vivant, à la nécessité de le sauvegarder et à l’interdépendance entre les aspects matériels et immatériels du patrimoine. Il a été récompensé par le « Prix ibéro-américain pour l’éducation et les musées » en 2013 et 2014. La DGPC s’est associée à l’Institut espagnol du patrimoine culturel pour le traduire en espagnol et le diffuser dans les pays hispanophones. Les organisations non gouvernementales et les organisations de la société civile mettent également en place des programmes éducatifs sur le patrimoine culturel immatériel : la Fondation INATEL propose plusieurs programmes spécifiques consacrés au patrimoine culturel immatériel tels que « Archéologie de l’invisible », tout particulièrement destinés à renforcer le programme scolaire dans ce domaine et à encourager une plus grande diversité d’approches dès les premières années d’école. La Fondation organise également dans plusieurs villes des cours et des ateliers artistiques et artisanaux sur les instruments de musique traditionnels ainsi qu’une formation à la gestion intégrée du tourisme pour le patrimoine culturel immatériel. L’enseignement supérieur propose des programmes de troisième cycle sur le patrimoine culturel immatériel et sur les savoir-faire traditionnels, l’anthropologie, l’ethnomusicologie et la littérature orale.
Entre 2008 et 2014, le Portugal s’est engagé dans la coopération internationale à travers différentes initiatives telles que la participation à des candidatures multinationales, l’organisation d’ateliers, de conférences et de séminaires internationaux, la participation à des réseaux d’experts, la coopération à des actions de formation, des projets éducatifs et de recherche et des échanges d’informations. Toutes ces activités ont été menées à la fois au niveau gouvernemental et par l’entremise d’organisations non gouvernementales accréditées auprès de l’UNESCO et d’universités. Par exemple, des cours de formation sur les méthodes de documentation ont été organisés en coopération avec l’Espagne et le Pérou. La DGPC s’est également engagée dans des réunions d’ échanges d’informations avec la France, la Belgique, le Brésil, la Pologne, l’Uruguay et l’Espagne auxquelles ont participé les organisations non gouvernementales accréditées et des interlocuteurs de chaque gouvernement. La Fondation INATEL est membre du Conseil international des organisations de festivals de folklore et d’arts traditionnels (CIOFF) et le Centre pour la recherche en anthropologie a réalisé des travaux de recherche dans plusieurs pays, ce qui a permis des échanges entre confrères spécialistes. De même, l’organisation non gouvernementale accréditée, Mémoire immatérielle Coopérative culturelle CRL, participe à des séminaires internationaux et à un festival du conte européen, elle est également le point focal pour le Portugal d’un projet européen, financé par l’UE sur le conte et l’environnement.
Le Portugal a trois éléments inscrits sur la Liste représentative’, dont une est une inscription multinationale : le Fado, chant populaire urbain du Portugal (2011) ; la diète méditerranéenne (2013, avec Chypre, la Croatie, la Grèce, l’Italie, le Maroc et l’Espagne) ; et le cante alentejano, chant polyphonique de l’Alentejo (sud du Portugal) (2014). Le dernier élément n’a pas été traité dans ce rapport.