Décision du Comité intergouvernemental : 16.COM 8.A.5

Le Comité

  1. Prend note que Djibouti a proposé la candidature du Xeedho (n  01736) pour inscription sur la Liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente : Au sein de la communauté somalie à Djibouti, le Xeedho est un plat offert par la belle-mère à son gendre pour célébrer la première semaine du mariage de sa fille. Il s’agit d’un récipient sculpté dans un tronc d’arbre, dans lequel sont placés de petits morceaux de viande de dromadaire séchée, frite dans du beurre et conservée dans du ghee. Un couvercle en feuilles de palmier orné de cuir et de coquillages est placé sur la viande et les dattes, et l’ensemble est recouvert d’un tissu blanc représentant les vêtements féminins. Les femmes attachent ensuite solidement des cordes tissées autour de l’objet pour lui conférer une forme féminine. Le septième jour après le mariage, un groupe de femmes, dirigé par la mère de la mariée, porte le Xeedho au marié en interprétant des chants et des danses traditionnels. Le marié et ses amis doivent alors essayer de trouver et de défaire les nœuds pour ouvrir le récipient. Cette pratique, transmise par les femmes à leurs filles et nièces, est un moyen de renforcer les liens sociaux entre les familles et de promouvoir le respect mutuel et la solidarité. Cependant, elle est menacée par la baisse d’intérêt des jeunes générations et l’absence de mécanismes formels de transmission et de promotion.
  1. Considère que, d’après les informations contenues dans le dossier et celles fournies par l’État soumissionnaire dans le cadre du processus de dialogue, la candidature satisfait aux critères suivants d’inscription sur la Liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente :
U.1 : L’élément englobe toutes les compétences liées à la préparation du plat offert par la belle-mère à son gendre le septième jour du mariage de sa fille. Il est pratiqué par l’ensemble de la communauté somalie de Djibouti et est réservé aux femmes possédant déjà une expérience en la matière. Les savoirs et savoir-faire sont transmis de manière informelle par les femmes à leurs filles et nièces. L’élément consolide les liens sociaux entre les deux familles et constitue un acte de générosité de la part de la belle-mère. Aucune partie de l’élément n’est contraire à la législation existante en matière de droits de l’homme et l’élément favorise le respect mutuel entre les communautés, les groupes et les individus.

U.2 : Le dossier démontre que l’élément a besoin d’une sauvegarde urgente. La viabilité de l’élément est principalement menacée par la diminution du nombre de praticiennes et par la réticence des jeunes générations à perpétuer la pratique de l’élément. Selon le dossier, la transmission est d’autant plus fragilisée que les jeunes générations préfèrent offrir des artefacts culturels associés aux nouveaux contextes urbains. Les jeunes mariés privilégient en outre les plats urbains. La transmission de l’élément souffre également d’une absence de cadre formel.Considère en outre que les informations fournies dans le dossier, ainsi que celles fournies par l’État soumissionnaire dans le cadre du processus de dialogue, ne sont pas suffisantes pour déterminer si les critères suivants d’inscription sur la Liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente sont satisfaits :

U.3: Le Ministère de la Culture a coordonné des programmes de formation pour l’inventaire et l’élaboration de plans de sauvegarde. L’Etat a également coordonné une étude pour déterminer l’urgence de la sauvegarde de l’élément. Un plan de sauvegarde est proposé, mais il n’est pas clair qui sont les communautés, groupes et individus concernés par l’élément, ni comment ils ont été impliqués dans le développement des plans de sauvegarde.

U.4: Le dossier ne fournit pas la preuve d’une large participation des détenteurs et des praticiens concernés. De plus, le dossier présente la mise en œuvre d’un plan de sauvegarde en termes de ce qui est prévu, plutôt qu’en termes de ce qui sera fait par rapport au rôle des porteurs et des praticiens. Le consentement libre, préalable et éclairé n’est pas non plus largement démontré, comme en témoignent les lettres de consentement qui accompagnent le dossier.

U.5: L’élément est inscrit depuis juillet 2020 dans le registre d’inventaire pilote en tant que « pratiques sociales et savoir-faire associés à l’artisanat ». Le registre est administré par la direction de la culture. L’identification et la définition de l’élément semblent avoir été faites en collaboration avec un praticien. L’inventaire doit être complété tous les deux ans. Toutefois, le processus de mise à jour de l’inventaire n’est pas bien expliqué, et la manière dont les communautés, groupes et individus concernés sont impliqués n’est pas claire non plus.
  1. Décide de renvoyer la candidature du Xeedho à l’État partie soumissionnaire et l’invite à resoumettre la candidature au Comité pour examen au cours d’un cycle ultérieur ;
  2. Prend note en outre que Djibouti a demandé une assistance internationale au Fonds du patrimoine culturel immatériel d’un montant de 116 450 dollars des États-Unis pour la mise en œuvre du plan de sauvegarde du Xeedho (n  01843) : Mis en œuvre par le Ministère des affaires musulmanes, de la culture et des biens waqfs, ce projet vise à revitaliser la pratique du Xeedho à Djibouti en organisant des associations de Xeedho composées de détenteurs et de représentants de communautés issus de plusieurs régions et en transmettant cet élément aux jeunes générations par le biais de sessions de formation. Le projet prévoit d’autres activités, telles que l’organisation d’ateliers de renforcement des capacités pour les enseignants, la création d’émissions audiovisuelles, de débats et de spots télévisés, l’élaboration d’un module pédagogique sur la transmission du patrimoine culturel immatériel en général et du Xeedho en particulier, et le développement de la recherche et de la documentation universitaires et scientifiques. La participation des communautés au projet sera assurée par le biais des associations du Xeedho ainsi que par l’implication des praticiens dans la mise en œuvre des activités prévues. L’État participera également en aidant à la gestion du projet, en mettant en œuvre les initiatives de recherche et en fournissant des subventions financières. En particulier, plusieurs ministères, dont le Ministère de l’éducation nationale et le Ministère de la femme, soutiendront la mise en œuvre du plan et la transmission de l’élément. Ce projet de deux ans devrait permettre de mieux faire connaître le Xeedho et le patrimoine culturel immatériel en général, et de fournir les ressources humaines et les connaissances nécessaires à la sauvegarde du patrimoine vivant à Djibouti.
  1. Considère également que, d’après les informations contenues dans le dossier et celles fournies par l’État soumissionnaire dans le cadre du processus de dialogue, la demande satisfait comme suit aux critères d’octroi de l’assistance internationale énoncés aux paragraphes 10 et 12 des Directives opérationnelles :
A.1 : L’association des artisanes d’Ali Sabieh, les communautés concernées et un seul praticien ont été associés à l’élaboration du plan de sauvegarde. La mise en œuvre du plan de sauvegarde se fera à travers les associations Xeedho qui seront créées. L’État, notamment le ministère de la Culture et le ministère de l’Éducation nationale, sera également impliqué dans le processus de mise en œuvre.

A.2 : Le budget total est bien ventilé sur les huit activités énoncées dans le dossier de candidature. Il est également cohérent par rapport au calendrier et aux principales activités du projet. Les montants sont raisonnablement répartis entre les différentes composantes du projet, et le montant le plus élevé est alloué aux activités principales de la demande.

A.3 : Grâce à la formation dispensée par l’UNESCO sur le cadre du programme global de renforcement des capacités, l’État partie a déployé des efforts pour développer une stratégie de sauvegarde réalisable. Malgré les doutes quant à la disponibilité des praticiens pour soutenir le programme compte tenu de l’objectif de former trente femmes en deux ans, le programme et le calendrier sont bien articulés aux objectifs et les mesures suggérées sont pertinentes pour résoudre les menaces qui pèsent sur l’élément.

A.4 : L’assistance permettra d’obtenir des résultats durables, conformément aux objectifs du programme. L’État partie acquerra une expérience en matière de sensibilisation au Xeedho en particulier et au patrimoine culturel immatériel en général. Il renforcera également la capacité du personnel à répondre aux défis liés à la mise en œuvre des plans de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel et à la pérennisation de certaines activités, telles que celles impliquant les communautés.

A.5 : Le budget total du projet est de 121 450 dollars des États-Unis, et l’État partie semble a fait des efforts pour fournir un financement dans la limite de ses ressources soit une contribution d’environ 2,5 pour cent du montant total. Un autre montant de 2 000 dollars des États-Unis est alloué grâce à d’autres sources.

A.6 : Le dossier indique que le projet contribuera à renforcer les capacités des acteurs concernés à sauvegarder l’élément. Plus de trente enseignants seront formés. En outre, les ateliers et autres activités prévues permettront de mobiliser et de renforcer les capacités des communautés, des individus, des chercheurs et des détenteurs pour améliorer la mise en œuvre de la Convention de 2003. Les communautés, en collaboration avec les médias, contribueront à sensibiliser à l’importance de la sauvegarde de l’élément et de leur patrimoine culturel immatériel par la diffusion de programmes audiovisuels.

A.7 : L’État partie a déjà bénéficié d’une assistance internationale du Fonds du patrimoine culturel immatériel pour le projet intitulé « Renforcement de capacités en matière d’élaboration d’inventaire participatif » (2019 ; 82 080 dollars des États-Unis). Le projet a été réalisé conformément à la réglementation de l’UNESCO et a été mené à bien.

Paragraphe 10(a) : Même si, le dossier ne mentionne pas de coopération au-delà du niveau national, le dossier démontre que les associations et détenteurs du Xeedho s’engageront dans la mise en œuvre du projet au niveau national. L’État sera également impliqué dans la mise en œuvre du plan de sauvegarde à travers les Ministères de l’éducation nationale, de la culture, de la femme, de la jeunesse, de l’artisanat et de la décentralisation ainsi qu’à travers les collectivités locales.

Paragraphe 10(b) : Le dossier indique que l’assistance demandée servira de base pour attirer des contributions financières et techniques d’autres partenaires, notamment à travers le développement d’outils de publicité et de communication ainsi que la mise en œuvre d’activités génératrices de revenus pour les détenteurs. Le programme lui-même servira de modèle pour la mise en œuvre d’autres activités de sauvegarde, qui conjointement exerceront des effets multiplicateurs.
  1. Décide d’approuver la demande d’assistance internationale de Djibouti pour la mise en œuvre du plan de sauvegarde du Xeedho et accorde à l’État partie un montant de 116 450 dollars des États-Unis à cette fin ;
  2. Invite en outre l’État partie à utiliser le formulaire ICH-04-Rapport pour rendre compte de l’utilisation de l’assistance accordée.

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