Décision du Comité intergouvernemental : 16.COM 8.b.40

Le Comité

  1. Prend note que la République arabe syrienne a proposé la candidature de l’al-Qudoud al-Halabiya (n  01578) pour inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

L’al-Qudoud al-Halabiya est un genre musical traditionnel composé d’une mélodie qui est toujours la même. Il est chanté dans un cadre religieux ou à des fins de divertissement, mais les paroles varient en fonction du type d’événement. Les chanteurs expérimentés peuvent improviser des paroles suivant la situation dans laquelle ils se trouvent. Ils sont connus pour leur voix grave et atteignent l’apogée de leur art lorsqu’ils tiennent une longue note ou répètent une phrase à maintes reprises, plongeant leur public dans un état appelé le tarab, ou extase. L’état émotionnel ressenti lorsque les artistes atteignent ce point culminant est décrit par les communautés comme « une ivresse sans alcool ». Le public joue un rôle clé, puisqu’il sert de source d’inspiration et exalte la créativité de l’artiste. Il danse traditionnellement au rythme de la musique en bougeant le haut du corps, les bras en l’air. La musique qudoud est accompagnée par un ensemble musical. Les alépins continuent de jouer cette musique dans les ruelles et les souks de la vieille ville. Influencé par les changements sociaux sans pour autant abandonner ses éléments traditionnels, le qudoud s’est également répandu dans d’autres parties de la ville. Des paroles non religieuses ont été ajoutées, racontant des histoires de vie, d’amour, de tradition et d’honneur, parfois tirées de la poésie populaire. Profondément ancré dans la culture alépine, le qudoud est considéré comme un outil de résilience, notamment pendant la guerre. Les connaissances sont transmises de manière informelle entre les mentors et les jeunes, et de manière formelle grâce aux programmes scolaires, aux émissions et aux programmes médiatiques.

  1. Considère que, d’après les informations contenues dans le dossier, la candidature satisfait aux critères suivants pour une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité:

R.1 :  L’élément est un genre musical traditionnel composé d’une mélodie toujours identique, chantée lors des évènements religieux ou à des fins de divertissement. Les paroles varient selon le type d’événement. Ses détenteurs et praticiens sont des chanteurs, dont de plus en plus de femmes, ainsi que des groupes de musique, des écrivains, des poètes, des spectateurs, des érudits soufis et des enfants. Les connaissances sont transmises oralement dans des contextes informels entre les mentors et les jeunes, mais aussi par des apprentissages formels dispensés par les programmes d’études (comme ceux de l’Institut Sabah Fakhri), les émissions et les programmes médiatiques. L’élément est un symbole d’identité collective, d’espoir, de continuité et d’appartenance, en particulier dans le contexte de la guerre. Il est pratiqué dans la plupart des célébrations sociales et des événements religieux et respecte les objectifs des droits de l’homme, puisqu’il promeut l’égalité des sexes, l’unité et le respect entre les différentes religions.

R.2 :  L’inscription permettra aux diverses communautés locales d’Alep de mieux connaître leur patrimoine culturel immatériel et les objectifs de la Convention de 2003. Elle mettra également en lumière d’autres expressions musicales syriennes et permettra aux communautés et aux décideurs nationaux de les reconnaître en tant qu’expressions à haute valeur historique et en tant que source d’identité culturelle nationale collective, et non seulement pour leur usage social et ludique. Au niveau international, l’inscription mettrait en évidence le rôle du patrimoine culturel immatériel comme outil de promotion de la résilience et du rétablissement des communautés, comme trait d’union entre les divergences et comme vecteur d’harmonie sociale. Enfin, l’inscription soulignerait le fait que ce processus de créativité humaine est le fruit de la diversité et de la cohésion des communautés.

R.3 : Les mesures de sauvegarde ont été principalement mises en œuvre par les détenteurs et les praticiens, sous forme de spectacles internationaux, de documentaires, de festivals régionaux, d’archives numériques et de recherches. L’État a fourni un soutien logistique et administratif, produit plusieurs publications et organisé de nombreux festivals culturels en rapport avec l’élément, en dépit des limitations dues au conflit armé. Diverses mesures de sauvegarde sont proposées, notamment la mise en place d’ateliers pour les enfants au niveau national, la fourniture d’équipements musicaux aux instituts et clubs de musique, la documentation et l’archivage, l’intégration de l’élément dans les événements culturels importants à Alep et l’élaboration d’une législation visant à impliquer les communautés dans la gestion de leur patrimoine culturel immatériel et la protection de la propriété intellectuelle. Les communautés concernées ont proposé diverses mesures au cours de discussions, où les femmes représentaient une proportion importante des participants.

R.4 : La candidature a été proposée en 2016 par un groupe de praticiens qui a collaboré avec le Trust syrien pour le développement pour préparer la candidature. Le dossier explique que le processus s’est fait de manière ascendante, du début de la candidature à l’obtention du soutien des organes gouvernementaux. Un comité composé de différentes parties prenantes a été formé, incluant des organisations gouvernementales et non gouvernementales ainsi que des chercheurs chargés de préparer la candidature. Des lettres de soutien démontrent le consentement libre, préalable et éclairé d’un échantillon représentatif de syndicats, d’associations et de praticiens. Le dossier et la vidéo montrent que les femmes se sont également impliquées dans le processus.

R.5 : Géré par le Ministère de la culture et le Trust syrien pour le développement, l’élément est inclus dans l’inventaire national des éléments du patrimoine culturel immatériel syrien depuis 2017. L’élément a été identifié lors du lancement de l’inventaire national et les détenteurs concernés l’ont eux-mêmes décrit pour favoriser son inclusion dans l’inventaire national. L’inventaire est mis à jour tous les deux ans avec la pleine participation et le consentement des détenteurs, sous la direction du Ministère de la culture et du Trust syrien pour le développement.

  1. Décide d’inscrire l’al-Qudoud al-Halabiya sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité ;
  2. Invite l’État partie à envisager un éventail plus large de mesures de sauvegarde pour assurer la viabilité de l’élément, au-delà de la promotion de l’élément ;
  3. Félicite l’État partie d’avoir présenté un dossier qui peut servir de bon exemple quant à la manière dont la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel peut fournir aux communautés une source de résilience dans les situations de conflits et de post-conflit et favoriser la consolidation de la paix et le dialogue entre les communautés ;
  4. Félicite en outre l’État partie pour son dossier bien préparé qui illustre remarquablement bien la manière dont l’inscription d’un élément sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité peut contribuer à assurer la visibilité et la sensibilisation à l’importance du patrimoine culturel immatériel en générale.

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