Décision du Comité intergouvernemental : 15.COM 8.c.3

Le Comité

  1. Prend note que l’Allemagne, l’Autriche, la France, la Norvège et la Suisse ont proposé les techniques artisanales et les pratiques coutumières des ateliers de cathédrales, ou « Bauhütten », en Europe, savoir-faire, transmission, développement des savoirs, innovation (n  01558) pour sélection et promotion par le Comité comme programme, projet ou activité reflétant le mieux les principes et objectifs de la Convention :

Le fonctionnement en ateliers, ou « Bauhüttenwesen », est apparu au Moyen Âge sur les chantiers de construction des cathédrales européennes. Aujourd’hui comme alors, ces ateliers accueillent différents corps de métiers œuvrant en étroite collaboration. En allemand, le terme Bauhüttenwesen désigne d’une part l’organisation d’un réseau d’ateliers œuvrant à la construction ou à la restauration d’un édifice, et d’autre part l’atelier lui-même, en tant que lieu de travail. Depuis la fin du Moyen Âge, ces ateliers ont constitué un réseau suprarégional qui s’étend au-delà des frontières nationales. Ces ateliers sauvegardent les coutumes et rituels traditionnels associés aux différentes professions, ainsi qu’une mine de connaissances transmises de génération en génération, à la fois oralement et par écrit. Confrontés à la pénurie progressive des compétences techniques et à la mécanisation croissante associée à une politique d’optimisation des coûts, les ateliers créés ou rétablis aux dix-neuvième et vingtième siècles sont devenus des institutions dédiées à la préservation, à la transmission et au développement des techniques et savoir-faire traditionnels. Leur engagement en matière de sauvegarde et de promotion du patrimoine vivant, qui se traduit par des mesures de sensibilisation, d’information et de communication et par une coopération étroite avec des acteurs du monde politique, de l’Église, de la conservation des monuments, des entreprises et de la recherche, peut être considéré comme un exemple à adapter et à mettre en œuvre dans d’autres contextes à travers le monde. Les ateliers, par leur organisation et leur système de formation à la pratique in situ, peuvent aussi servir de modèles pour tous types de bâtiments à construire et à entretenir.

  1. Estime que, d’après les informations contenues dans le dossier, le programme répond comme suit aux critères de sélection en tant que bonne pratique de sauvegarde, tels qu’énoncés au paragraphe 7 des Directives opérationnelles :

P.1 :  La proposition expose précisément le contexte, la situation historique, la justification et les objectifs du programme, ainsi que l’évolution et la situation actuelle du système des Bauhütten. Les ateliers contemporains visent à transmettre et à maintenir vivants les connaissances et les savoir-faire artisanaux traditionnels, mais aussi à appliquer et développer des méthodes modernes de conservation des édifices qui nécessitent un entretien constant. Les États parties soumissionnaires ont décrit les mesures de sauvegarde suivantes : la sauvegarde des fondamentaux de l’apprentissage associés au système ; l’adoption de technologies innovantes pour la formation et la gestion des chantiers ; la conservation et l’exploitation d’une documentation pluriséculaire ; la préservation de rituels et de coutumes festives ; et la sensibilisation aux pratiques concernées.

P.2 :  La coopération est un élément structurant du fonctionnement en ateliers depuis le Moyen Âge. Ces ateliers (Bauhütten) se sont organisés pour former un réseau européen transnational. Dans ce contexte, une Association européenne a vu le jour ; des réunions, des échanges, des colloques et des initiatives pédagogiques ont été organisés ; un système d’apprentissage/d’activités itinérantes s’est perpétué depuis le Moyen Âge ; et un brevet de certification des maîtres artisans, coordonné à l’échelle européenne, a été créé. Cette coopération favorise le partage de connaissances et de savoir-faire interculturels.

P.3 :  L’organisation en ateliers stimule le dialogue et les échanges grâce à la création de réseaux fondés sur la collaboration et le respect mutuel. De fait, ce format rassemble un grand nombre de métiers et de filières techniques, prend en considération l’égalité des genres et développe au sein des communautés concernées un sentiment de continuité qui se transmet également de génération en génération. Les ateliers permettent de conserver et de renouveler les pratiques traditionnelles, favorisent les modes traditionnels de transmission et font prendre conscience de la relation entre le patrimoine matériel et le patrimoine immatériel en général.

P.4 :  Le programme est fondé sur l’alliance de plusieurs pratiques du patrimoine culturel immatériel relevant de l’artisanat traditionnel avec des technologies modernes et innovantes. La viabilité de la pratique est assurée par la nature même des ateliers, qui forment de véritables communautés de vie et de travail. Les ateliers mettant en avant les principes éthiques des relations sociales et favorisant un sentiment d’appartenance, ce ne sont pas que des sites de production. Grâce au système élaboré de transmission des connaissances sur lequel elle repose, la pratique est également respectueuse de l’importance des jeunes générations.

P.5 :  La proposition fait état de l’implication des communautés concernées, qui rassemblent des hommes et des femmes de tous âges, indépendamment de leur milieu social, de leurs origines, de leur religion et de leurs qualifications, parmi lesquels des apprentis, des architectes et des responsables publics. Les ateliers sont gérés par une grande variété d’organisations, organismes de tutelle et associations. Un grand nombre des preuves du consentement libre, préalable et éclairé des communautés témoignent d’une grande créativité.

P.6 :  Le système de sauvegarde par des ateliers peut être appliqué à toutes sortes de construction. L’essence même du fonctionnement en ateliers est de favoriser la formation et la transmission ainsi que le travail en coopération. Ces caractéristiques peuvent facilement se décliner dans d’autres contextes géographiques ou sociaux, car aucune restriction liée à l’origine, à la religion ou à la nationalité n’affecte l’activité. En outre, la collaboration dans tous les métiers peut être considérée comme un modèle d’inclusion et d’égalité entre les genres.

P.7 :  La volonté de coopérer et de diffuser les meilleures pratiques, manifestée par toutes les parties concernées, est déjà ancrée dans la pratique elle-même qui repose sur la coopération et la constitution de réseaux. Le dossier fournit une série d’exemples des méthodes actuelles dans ce domaine. Le dossier décrit également d’autres pistes à explorer davantage, notamment le rôle de conseils scientifique et technique pour d’autres monuments historiques, sur des problématiques architecturales ou sur le traitement du verre par exemple.

P.8 :  Le dossier donne des informations détaillées sur l’évaluation des aspects suivants : qualité de la formation ; développement durable ; coordination du travail et organisation cohérente ; documentation, notamment quant au suivi des pratiques ; pérennité des mesures grâce à des cycles de restauration plus longs ; création d’un « conservatoire vivant » des fêtes et rituels ; et gestion transparente vis-à-vis des partenaires extérieurs. Ces processus peuvent être évalués au moyen de rapports rendus publics.

P.9 :  Le modèle du fonctionnement en ateliers pourrait être adapté à différents contextes économiques et géographiques. La création d’un atelier ne nécessite pas d’importants moyens. En outre, la transmission et la diffusion de ce modèle comme outil efficace pour la sauvegarde des pratiques artisanales pourraient être reproduites.

  1. Décide de sélectionner les techniques artisanales et les pratiques coutumières des ateliers de cathédrales, ou « Bauhütten », en Europe, savoir-faire, transmission, développement des savoirs, innovation comme programme, projet ou activité reflétant le mieux les principes et objectifs de la Convention ;

  2. Rappelle qu’il est important que les États parties s’assurent, dans leurs prochains dossiers de candidature, que tous les documents, y compris les lettres de consentement, mentionnent le bon mécanisme d’inscription sur les listes de la Convention de 2003 ;

  3. Félicite les États parties d’avoir proposé un programme qui démontre de manière exemplaire l’importance de la coopération multinationale pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel.

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