Décision du Comité intergouvernemental : 16.COM 8.b.42

Le Comité

  1. Prend note que la Thaïlande a proposé la candidature du nora, drame dansé dans le sud de la Thaïlande (n  01587) pour inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

Le nora se présente sous forme d’une danse vivante et acrobatique accompagnée de chants improvisés, présent dans le sud de la Thaïlande. Les spectacles se caractérisent généralement par une longue invocation orale, suivie d’une présentation par un personnage principal qui danse en exécutant des mouvements vigoureux et complexes avec ses jambes, ses bras et ses doigts. Les représentations racontent habituellement les vies antérieures de Bouddha ou les épopées de héros légendaires. Un ensemble joue une musique très rythmée et rapide, caractérisée par une mélodie jouée par un hautbois traditionnel du sud et des rythmes forts produits par des tambours, des gongs, des cymbales et des claquettes en bois. Les principaux interprètes du nora, hommes ou femmes, portent des costumes colorés complétés de couronnes ou de coiffes, des perles, des ailes d’oiseau nouées autour de la taille, des foulards ornementés et des queues de cygne qui leur donnent l’apparence d’un oiseau. Les artistes portent également de longs ongles métalliques recourbés sur le bout des doigts. Le nora est une pratique communautaire qui revêt une grande importance culturelle et sociale pour les habitants du sud de la Thaïlande. Les spectacles utilisent les dialectes, la musique et la littérature de la région pour renforcer la vie culturelle et les liens sociaux au sein de la population locale. Né il y a plus de cinq cents ans, le nora est pratiqué dans les centres communautaires locaux, lors des foires organisées dans les temples et à l’occasion des événements culturels. Cette pratique est transmise par les maîtres au sein des foyers, par les organisations communautaires et par les établissements d’enseignement.

  1. Considère que, d’après les informations contenues dans le dossier, la candidature satisfait aux critères suivants pour une inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :

R.1 : L’élément est lié aux rituels et aux cérémonies, y compris ceux qui ont des pratiques et des significations religieuses. Les danses sont généralement basées sur des faits religieux, des contes ou des traditions locales. Les maîtres sont les principaux détenteurs et les praticiens de l’élément et ce sont eux qui exécutent les rituels du nora, dirigent les troupes et se produisent en tant que chanteurs et danseurs principaux. Ils enseignent souvent le nora dans les écoles et les établissements d’enseignement supérieur. Les interprètes, les musiciens, les artisans et les participants aux cérémonies de nora comptent également parmi les praticiens. Traditionnellement réservé aux hommes, l’élément s’ouvre aujourd’hui aux femmes et aux jeunes filles à plusieurs égards. Il est transmis grâce aux formations dispensées par des maîtres au sein des foyers, dans les organisations communautaires et dans les établissements d’enseignement. Étroitement lié aux traditions orales et aux dialectes de la communauté, le nora renforce la vie culturelle locale et l’identité sociale des communautés concernées.

R.2 : Au niveau local, l’inscription permettrait à la communauté du nora d’être plus confiante en sa capacité à sauvegarder collectivement l’élément, tout en promouvant le respect de l’égalité, de l’inclusion et des diverses expressions culturelles. Au niveau national, l’inscription renforcerait la notion de coopération socioculturelle et créerait diverses plates-formes de participation, telles que celles fournies par le gouvernement, les médias et les institutions éducatives, ainsi que par la communauté dans son ensemble. Au niveau international, l’inscription permettrait de mettre en lumière cette forme d’art traditionnelle et sa sagesse communautaire, ainsi que de rapprocher les communautés locales avec des traditions et des pratiques d’autres régions, partageant des caractéristiques similaires, comme les instruments de musique, l’imagerie et les mouvements de danse. Elle permettrait également d’accroître les échanges entre les praticiens des différentes lignées du nora et faciliterait l’expression de la créativité humaine à travers la conception de costumes.

R.3 : Bien que les mesures de sauvegarde aient traditionnellement été caractérisées par un système de lignées, un changement s’est amorcé dans les années 1960, lorsque les établissements d’enseignement ont commencé à inviter des maîtres du nora à enseigner aux étudiants, y compris aux femmes, dans des clubs. Les diplômés formés au nora ont depuis occupé des postes d’enseignants dans tout le sud de la Thaïlande et le nora est enseigné dans les écoles et les universités depuis les années 1970 lorsqu’il a intégré officiellement le programme scolaire des établissements d’enseignement primaire, secondaire et supérieur, avec le soutien du gouvernement. Les associations et réseaux d’artistes apportent également une aide financière aux artistes. Une série de mesures est prévue, comme le soutien des activités de recherches, le financement, l’élargissement de l’appréciation par le biais de représentations régulières et saisonnières et le développement d’un mécanisme de soutien aux artistes et praticiens du nora dans leur ensemble. Elles sont proposées comme des mesures conjointes qui seront mises en œuvre par l’État en collaboration avec les communautés, les détenteurs et les praticiens concernés. Le dossier souligne le travail des communautés dans l’élaboration des mesures de sauvegarde.

R.4 : Le dossier décrit un processus de participation systématique des communautés, des groupes et des individus concernés par l’élément. En 2016, des universitaires et d’autres parties prenantes du sud de la Thaïlande ont formé la Rak Pak Tai Society et, avec le soutien du gouvernement, ont entrepris de dresser un inventaire communautaire du nora en vue d’une éventuelle candidature à l’UNESCO. Le processus s’est poursuivi en 2018 avec la rédaction du dossier de candidature. Le consentement libre, préalable et éclairé est démontré par les lettres de consentement jointes au dossier. L’élément est accessible à toutes les communautés, groupes et individus concernés, ainsi qu’aux observateurs non locaux qui souhaitent participer dans le plus grand respect en formulant poliment la demande de manière formelle. Il convient de noter que certains vers sacrés sont toujours réservés à des apprentis triés sur le volet.

R.5 : L’élément figure dans l’inventaire national du patrimoine culturel immatériel de la Thaïlande depuis 2009 et est géré par le Département de la promotion culturelle du Ministère de la culture. L’élément a été identifié et défini au terme d’enquêtes, de recherches et de collectes de données menées par des chercheurs locaux travaillant avec les communautés du nora. Le processus de candidature a été exécuté entre 2016 et 2018, et l’inventaire est mis à jour tous les deux ans pour inclure de nouveaux éléments. Les informations documentées sont révisées tous les trois ans et sont initiées par des comités provinciaux, en collaboration avec les communautés concernées. Les informations sont ensuite envoyées au Département de la promotion culturelle en vue de leur diffusion publique.

  1. Décide d’inscrire le nora, drame dansé dans le sud de la Thaïlande sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité ;
  2. Encourage l’État partie à élaborer des mesures de sauvegarde pour traiter les conséquences involontaires liées à l’augmentation du tourisme afin de prévenir l’impact potentiel d’une commercialisation excessive et d’une décontextualisation de l’élément.

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