Le Comité
- Prend note que l’Argentine a proposé la candidature du chamamé (n 01600) pour inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité :
Le chamamé est une forme d’expression culturelle principalement pratiquée dans la province de Corrientes. Ses principaux composants intègrent un type de danse en « abrazo fermé » où les danseurs évoluent poitrine contre poitrine et suivent la musique sans chorégraphie préétablie. D’autres éléments concernent la musiqueada, moment festif qui inclut la fête, l’invitation, la prière et le sapukay, cri caractéristique accompagné d’un mouvement du corps destiné à exprimer des émotions et des sensations profondes comme la joie, la tristesse, la douleur et le courage. Les instruments utilisés à l’origine étaient le violon et la vihuela, auxquels sont venus s’ajouter la guitare, l’harmonica, l’accordéon diatonique à deux rangées, le bandonéon et la contrebasse Les chants tirent leurs origines des prières chantées. Traditionnellement, les paroles et les textes poétiques étaient en guaraní, la langue autochtone régionale, mais aujourd’hui, les traditions orales se transmettent dans le dialecte yopará, un dialecte qui mêle l’espagnol et le guaraní. La musique et la danse du chamamé représentent une part importante de l’identité régionale et jouent des rôles sociaux majeurs car ce sont des éléments communs que l’on retrouve lors des rassemblements pour les communautés et les familles, des célébrations religieuses et autres événements festifs. Le chamamé met en avant des valeurs telles que l’amour de sa terre, l’attachement à la faune et la flore locales, la dévotion religieuse et une « manière d’être, » une expression guaraní qui renvoie à une parfaite harmonie entre les êtres humains, la nature et la spiritualité.
- Estime que, d’après les informations contenues dans le dossier, la candidature satisfait aux critères d’inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité comme suit :
R.1 : Le chamamé se transmet à l’oral de génération en génération, en particulier dans le cercle familial, mais aussi au sein de la communauté et dans des lieux publics Le dossier décrit et distingue de façon adéquate les différents types d’individus impliqués dans le chamamé en distinguant la communauté des praticiens d’une communauté plus large concernée par le chamamé. En tant qu’élément vital des identités des communautés, cette pratique encourage l’utilisation et la préservation du guaraní et permet d’exprimer la douleur, la joie ou d’autres émotions à travers le sapukay, qui illustre diverses situations de la vie quotidienne. Le dossier indique en quoi le chamamé est une pratique inclusive qui rassemble des individus de tous les âges, de tous les genres et de tous les statuts sociaux de la région.
R.2 : L’inscription du chamamé résonnerait aux échelles locale, nationale et internationale en renforçant l’importance de la musique, de la danse, des rassemblements festifs et des rituels. Dans le même temps, l’inscription de l’élément permettrait également d’assurer la visibilité du patrimoine culturel immatériel en général. Cela contribuerait au dialogue intergénérationnel et à l’émergence d’un sens de la communauté et d’une identité qui dépasse les frontières. Cela pourrait également contribuer à l’appréciation de la diversité culturelle et de la tolérance par les jeunes en démontrant la créativité humaine par le biais des expressions musicales et de la poésie.
R.3 : La candidature propose une large gamme de mesures de sauvegarde, et notamment : la promotion de nouveaux espaces et le renforcement des espaces existants ; la transmission des savoirs et savoir-faire en lien avec l’élément ; l’éducation informelle ; des activités de promotion et de préservation ; le soutien de la création de nouvelles productions musicales ; et la recherche et l’identification de mesures. Le soutien de l’État partie aux mesures de sauvegarde proposées est planifié de façon cohérente. La participation des groupes et communautés concernés dans le cadre du processus de conception des mesures de sauvegarde est également décrite de façon adéquate.
R.4 : La communauté des détenteurs et des praticiens du chamamé (musiciens, compositeurs, poètes, danseurs, interprètes, artisans et professeurs, entre autres) a participé activement à la préparation de la candidature. À cette fin, des « espaces de dialogue et de réflexion » et des « ateliers sur les mesures de sauvegarde » ont été organisés. Des lettres de consentement fournies par les communautés ont été jointes au dossier.
R.5 : L’élément a été inclus de façon formelle au Registre du patrimoine culturel immatériel de la province de Corrientes en 2017 qui est géré par l’Institut de la culture de la province de Corrientes. Ce Registre est mis à jour tous les ans. Le processus d’identification et de définition a été entrepris avec la participation représentative des hommes et femmes de la communauté du chamamé par le biais de l’organisation conjointe d’ateliers participatifs avec les municipalités coordonnés par une équipe formée par l’Institut de la culture de Corrientes.
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Décide d’inscrire le chamamé sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité ;
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Félicite l’État partie pour la présentation d’un dossier amélioré à la suite de la décision du Comité de renvoyer la candidature en 2018, dossier qui démontre la façon dont l’inscription du chamamé pourrait contribuer à la sensibilisation des individus au patrimoine culturel immatériel en général et présente une méthodologie améliorée basée sur la communauté dans le cadre de la préparation à la candidature ;
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Encourage l’État partie à porter une attention particulière à l’impact potentiel d’une commercialisation excessive dans le cadre de la sauvegarde de l’élément à la suite de son inscription qui n’a pas été prise en compte dans les mesures de sauvegarde proposées ;
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Encourage en outre l’État partie, lors de la soumission future de dossiers de candidature, à éviter les lettres de consentement standardisées et à fournir des lettres de consentement actualisées ;
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Rappelle que l’inscription d’un élément sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité n’implique pas d’exclusivité et encourage également l’État partie à garder à l’esprit le contexte culturel plus large de l’élément dans la région lors de la mise en œuvre des mesures de sauvegarde.